L’action des peuples autochtones pour le climat et la biodiversité
Stanislas Kambashi, SJ – Cité du Vatican
Institué en 2011, le Forum mondial des peuples autochtones au Fida (Fond international de développement agricole) se tient tous les deux ans. Son 6ème Colloque international a eu pour thème: «les peuples autochtones se chargent de l’action climatique. Des solutions communautaires au service de la résilience et de la biodiversité». Cette assise a rassemblé des représentants des peuples autochtones des cinq continents. La région Afrique a été représentée par Espérance Binyuki Nyota, de la RDC, coordinatrice de l’organisation Union pour l’émancipation de la femme autochtone et membre du comité de pilotage au sein du Fida. Dans une interview accordée à Pope, elle est revenu sur la pertinence de ce forum.
Les peuples autochtones, une réponse à la problématique du changement climatique
Les peuples autochtones sont une réponse à la problématique du changement climatique, grâce notamment à leurs cultures préservatives, souligne Espérance Nyota. Vivant en syntonie avec la biodiversité, ils savent comment mieux la protéger et la préserver. A travers leurs cultures, ils savent comment gérer «rationnellement» les ressources différemment d’autres communautés, afin de les avoir continuellement, sur des centaines ou des millénaires d’années. C’est «une sagesse ancestrale, endogène, un management de la biodiversité» grâce auquel certaines réserves naturelles existent encore aujourd’hui, pense Espérance Nyota.
Les communautés autochtones protègent mieux que les multinationales
Comme exemple, Espérance Nyota évoqué le cas de construction des maisons. Pour avoir le bois à utiliser parmi les matériaux, les autochtones ne déboisent pas à la même échelle que les multinationales, qui coupent des milliers d’hectares d’arbres pour la commercialisation; parfois sans reboiser. La représentante de la région Afrique à ce colloque a aussi cité le cas de certaines espèces de la faune ou de la flore, considérées comme des totems dans certaines communautés. En vertu de cette signification symbolique, elles préservent ces animaux et plantes, les protègent et les sauvent de l’extermination.
Le monde moderne peut beaucoup à apprendre des savoirs autochtones
Ce sixième colloque organisé par le Fida a également insisté sur la contribution des savoirs des peuples autochtones à la résilience et à la durabilité des moyens d’existence et des systèmes alimentaires dans le monde. Pour Espérance Nyota, le monde moderne peut beaucoup apprendre des manières de faire de leurs savoirs à ce sujet. Le système alimentaire des peuples autochtones «prend en compte toute la chaîne des valeurs» notamment dans l’agriculture et l’élevage, a-t-elle fait observer. Pour l’agriculture, on doit avoir la semence naturelle, afin de produire des aliments sains suivant une quantité et un délai raisonnable. Par souci de produire plus en un temps record afin de satisfaire les besoins d’une démographie croissante, on utilise des méthodes parfois destructrices de la santé et de la nature, regrette-elle. Elle estime que «les semences naturelles ont la capacité de produire à grande échelle», si on respecte la culture qui veut que «si tu veux manger à 12 heures, il faut commencer à préparer à 8 heures, pour une bonne cuisson. Aujourd’hui, on est malheureusement tombé dans une paresse et une facilité: on veut manger à midi, mais on veux commencer à préparer à 11 heures 30». Ainsi avons-nous aujourd’hui des aliments non-appropriés, qui se révèlent à la longue nocifs pour l’organisme humain.
Il est encore possible de récupérer les méthodes naturelles
Pour Espérance Nyota, il est encore possible de recourir aux méthodes naturelles, en reconstituant des banques de données des semences naturelles, afin de les mettre à la disposition des exploitants et producteurs. A travers certains projets, ces pratiques sont déjà expérimentées à certains endroits, comme au Sud-Kivu, à l’Est de la RD Congo. Quelques groupes de femmes des communautés autochtones recherchent des produits naturels utilisés dans leurs milieux et produisent à partir de ces semences locales. Au forum organisé par le Fida, Espérance Nyota a présenté une quantité des grains d’arachides produits par ces femmes.
Des recommandations pour améliorer l’action du Fida et des peuples autochtones
Parlant de la participation des africains, Espérance Nyota a indiqué que, à ce forum, les représentants de la région Afrique ont contribué avec des recommandations. Parmi elles figure l’«engagement du Fida»: les représentants de l’Afrique demandent que le Fida puisse approfondir «son rôle et sa politique aux côtés des peuples autochtones», dans sa recherche de l’amélioration de leurs conditions de vie. En deuxième lieu, les participants ont souhaité que le Fida «puisse accroître le financement alloué à ces peuples, en faveur de l’action climatique, en faisant en sorte que les financements leurs parviennent plus directement; et simplifier le processus de candidature aux mécanismes d’assistances pour les peuples autochtones». A cause de beaucoup d’intermédiaires, les financements n’arrivent pas directement et parfois réduits, ce qui amoindrit l’impact de leur action.
Impliquer les communautés autochtones dans les projets
Une autre proposition est la participation et consultation des communautés autochtones, même de la part des gouvernements, dans la conception et la mise en Ĺ“uvre des projets, afin de «garantir leur consentement libre, préalable et éclairé». Le Fida a aussi été appelé à renforcer les capacités des peuples autochtones, afin qu’ils soient en mesure de se prendre en charge, sur le plan technique par exemple. Soutenir les initiatives, établir des plans de stages «afin de renforcer la coopération sud-sud» et de soutenir les initiatives des jeunes, des femmes et des peuples autochtones; encourager les gouvernements dans la planification territoriale et le développement territorial afin que les peuples autochtones se voient pas expropriés de leurs terres, sont autant d’autres recommandations qui ont été faites.
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