Cardinal Parolin : en Roumanie, le Pape rappellera les racines chrétiennes de l'Europe
Massimiliano Menichetti – Cité du Vatican
Éminence, dans quel esprit le Pape s'apprête-t-il à partir ?
Le départ aura lieu le jour où l'Église latine célèbre la Visitation de Marie, Marie qui se met en route pour aller servir sa cousine Élisabeth. Ainsi, même la devise qui caractérise ce voyage du Pape, a une forte empreinte mariale. C'est une façon de marcher ensemble dans le style de la Sainte Vierge Marie, un style d'humilité, de service, de charité, envers sa cousine et les plus nécessiteux. Il me semble que le Pape part précisément avec cette attitude, avec cet esprit : il veut devenir un pèlerin pour partager le chemin de ces communautés chrétiennes, celui de la communauté civile, de la société en Roumanie ; il veut devenir un pasteur pour encourager ses frères et sÅ“urs dans la foi, en tenant compte aussi de la richesse des expressions et rites qui caractérisent l'Église en Roumanie. Et il veut être un témoin de charité, en particulier envers les jeunes, les invitant à toujours encourager cette culture de la rencontre, comme il le dit, qui nous permet vraiment de nous retrouver dans un moment historique où les divisions et les contrastes prévalent. Il me semble que c'est dans cet esprit que le Saint-Père a l'intention de faire ce voyage.
La rencontre avec les communautés latine et gréco-catholique dans un pays à majorité orthodoxe. Un cheminement pastoral, mais qui aura aussi une forte impulsion Å“cuménique...
Oui, c'est aussi une caractéristique qui marque fortement ce voyage. Rappelons-nous qu'il y a à peine vingt ans, en mai 1999, saint Jean-Paul II s'est rendu en Roumanie. C'était un voyage que l'on peut qualifier d'historique, car il a permis de visiter d'autres pays à majorité orthodoxe. Nous nous souvenons tous du cri qui s'est élevé de la place : "Unité ! Unité !". C'était certainement un premier pas, un pas fondamental. Le chemin parcouru aujourd'hui par le Pape s'inscrit un peu dans ce sillage ; il veut être un pas de plus dans cette direction, en Å“uvrant - précisément - pour l'Å“cuménisme. Il me semble que, d'un point de vue Å“cuménique, deux choses doivent être soulignées : la première réalité est celle de la Roumanie en tant que carrefour où l'Europe orientale et occidentale se rencontrent, pont entre les différentes réalités, comme en témoigne aussi son riche patrimoine artistique avec lequel elle a vraiment un héritage ; la seconde est l'aspect du témoignage commun. Il y a déjà eu un Å“cuménisme, ce que le Pape appelle un Å“cuménisme du sang, ou des croyants qui appartenaient à la fois à l'Église catholique et à l'Église orthodoxe qui ont souffert sous le régime athée qui a opprimé la liberté religieuse et les droits des fidèles. Ils sont donc déjà parvenus à s'unir dans la souffrance, dans le martyre. Nous espérons que nos frères qui sont déjà au ciel et qui jouissent de la gloire de Dieu après avoir souffert sur la terre, pourront aider à continuer ce voyage.
Le Pape sera accueilli dans le sanctuaire marial de Șumuleu-Ciuc en particulier par la minorité hongroise, concentrée en Transylvanie. Il y a ceux qui parlent, de façon un peu provocante, d'un voyage dans le voyage. Est-ce que c'est le cas ?
En Roumanie, nous pouvons utiliser une autre image que saint Jean Paul II a déjà utilisée lorsqu'il parlait du jardin de Notre Dame, dans le sens d'un jardin varié. Il y a différentes communautés : pensez aux catholiques qui sont latins dans différentes langues : roumain, hongrois, polonais, croate... puis il y a la communauté arménienne, composée en grande majorité d'orthodoxes et de divers groupes ethniques, dont le Hongrois, qui constitue une présence importante. Je pense que nous connaissons tous la sensibilité du Pape, son appel continu au respect des différentes composantes, traditions, cultures, coutumes de chaque réalité, dans l'unité du pays. Je crois que le Pape lancera un appel en ce sens, c'est-à-dire au respect dans l'unité du pays. Et dans le sanctuaire où il ira, cet appel résonnera particulièrement fort ; un appel à marcher ensemble, comme le dit la devise de ce voyage, à surmonter les divisions historiques et à se retrouver tous dans l'unité de la foi partagée.
François sera en Roumanie vingt ans après la visite de saint Jean Paul II. Aujourd'hui, le pays est intégré avec espérance dans une Europe qui vient de sortir des élections. Quel message le Pape apporte-t-il ?
Je crois que le Pape apporte un message d'encouragement. La Roumanie a connu des moments difficiles dans son histoire : l'occupation étrangère, la longue période d'athéisme... Depuis 2007, elle fait partie de l'Union européenne et a apporté une contribution significative, à commencer par son patrimoine culturel. Récemment, à Sibiu s'est tenu un sommet au cours duquel l'importance de la paix, de la longue période de paix garantie par l'Union européenne, de la prospérité et des progrès qu'elle a permis de réaliser a été soulignée. Le Pape rappellera naturellement les valeurs fondatrices de cette Europe et aussi les racines chrétiennes, car ces valeurs - la dignité de la personne, la solidarité - trouvent leur fondement le plus solide précisément dans l'héritage chrétien dont la Roumanie est aussi porteuse. Ce sera donc un encouragement à continuer d'apporter sa propre contribution à la construction de cette Europe qui, nous l'espérons, deviendra de plus en plus solide, fondée sur des valeurs fondamentales comme les valeurs chrétiennes.
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