Consistoire: le Collège cardinalice, appelé à ressembler à un orchestre symphonique
Myriam Sandouno – Cité du Vatican
Fidèles chrétiens, familles, différentes délégations venus des quatre coins du monde entier, près de 12 000 personnes ont pris part à la cérémonie solennelle du 9ème consistoire ordinaire du pontificat de François depuis son élection en 2013. Ce samedi 30 septembre, 20 nouveaux cardinaux présents issus de quatre continents, ont reçu leur barrette des mains du Saint-Père, qui dans son homélie a tout d'abord relevé «une surprise» dans le récit de la Pentecôte, dans laquelle il dit avoir reconnu avec joie l'humour de l'Esprit Saint. Elle consiste «dans le fait que normalement, nous, pasteurs, lorsque nous lisons le récit de la Pentecôte, nous nous identifions aux Apôtres».
Il est normal qu’il en soit ainsi, a reconnu le Pape. Par contre, ces juifs religieux résidants à Jérusalem dont parle le Livre des Actes des apôtres «Parthes, Mèdes, Elamites, etc…», que «dans mon esprit j’avais associés aux cardinaux, n’appartiennent pas au groupe des disciples, ils sont hors du cénacle, ils font partie de cette “foule” qui s’est “rassemblée” en entendant le bruit causé par le vent impétueux. Les Apôtres étaient “tous Galiléens” (cf. v. 7), tandis que les gens qui s’étaient rassemblés étaient "de toutes les nations sous le ciel", comme le sont les Évêques et les cardinaux à notre époque», a affirmé François.
La naissance d'une Église sainte, catholique et apostolique
Une telle inversion des rôles pousse certes à la réflexion, mais en observant de plus près, elle révèle une perspective intéressante: Il s’agit de «nous appliquer - moi le premier - a déclaré le Pape tout en faisant remarquer ensuite que l’expérience de ces juifs qui, par un don de Dieu, se sont trouvés protagonistes de l’événement de la Pentecôte, c’est-à-dire du “baptême” dans l’Esprit Saint, a donné naissance à l’Église une, sainte, catholique et apostolique».
Cette perspective se résume à: «redécouvrir avec étonnement le don d’avoir reçu l’Évangile», a souligné François, "dans nos langues"», comme le disaient les Juifs de naissance et convertis, Crétois et Arabes le jour de Pentecôte. Mais aussi à «repenser avec gratitude au don d’avoir été évangélisés et d’avoir été tirés de peuples qui, chacun en son temps, ont reçu le Kérygme, l’annonce du mystère du Salut, et qui, en l’accueillant, ont été baptisés dans l’Esprit Saint et sont entrés dans l’Église». Cette «Église mère qui parle dans toutes les langues, qui est une et qui est catholique».
La grâce de l'Évangile pour les peuples
Le Pape a estimé qu’avant d’être «apôtres», prêtres, évêques, cardinaux, «nous sommes “Parthes, Mèdes, Élamites” etc. Et cela devrait éveiller en nous l’étonnement et la gratitude pour avoir reçu la grâce de l’Évangile dans nos peuples d’origine respectifs. Je pense que cela est très important et qu’il ne faut pas l’oublier», a-t-il dit, car «c’est là, dans l’histoire de notre peuple, je dirais dans la “chair” de notre peuple, que l’Esprit Saint a opéré le miracle de la communication du mystère de Jésus-Christ mort et ressuscité». Et «il nous est parvenu “dans nos langues”, sur les lèvres et dans les gestes de nos grands-parents et de nos parents, des catéchistes, des prêtres, des religieux...», a ajouté le Souverain pontife. Chacun «peut se souvenir de voix et de visages concrets. La foi est transmise “en dialecte”, par les mères et les grands-mères», a-t-il déclaré.
Un don à renouveler dans la foi
À tous ces nouveaux cardinaux et fidèles présents, François a rappelé que «nous sommes en effet des évangélisateurs dans la mesure où nous gardons dans notre cœur l’émerveillement et la gratitude d’avoir été évangélisés; ou plutôt d’être évangélisés, parce qu’en réalité il s’agit d’un don toujours actuel qui demande à être continuellement renouvelé dans la mémoire et dans la foi».
La Pentecôte - comme le Baptême – n’appartient pas au passé, c’est un acte créateur que Dieu renouvelle continuellement, a-t-il précisé. «L’Église - et chacun de ses membres - vit de ce mystère toujours actuel. Elle ne vit pas de “rente”, encore moins d’un patrimoine archéologique aussi précieux et noble soit-il».
L’action de l’Esprit Saint
La présence de l’Esprit Saint reste toujours effective, car pour François, «l’Église, et chaque baptisé, vit dans l’aujourd’hui de Dieu par l’action de l’Esprit Saint». «Même l’acte que nous accomplissons ici en ce moment a un sens si nous le vivons dans cette perspective de foi», a-t-il fait remarquer.
S’adressant directement aux cardinaux, le Pape a affirmé ceci: «vous, nouveaux cardinaux, vous êtes venus de différentes parties du monde, et le même Esprit qui féconda l’évangélisation de vos peuples renouvelle maintenant en vous votre vocation et votre mission dans l’Église et pour l’Église».
L’image de l’orchestre et la synodalité
C’est à cela que le Collège cardinalice est appelé à ressembler, a dit François. «Un orchestre symphonique représentant la symphonie et la synodalité de l’Église», non seulement «parce que nous sommes à la veille de la première Assemblée du Synode, qui porte précisément sur ce thème, mais aussi parce qu’il me semble que la métaphore de l’orchestre peut bien éclairer le caractère synodal de l’Église».
La symphonie
Poursuivant, le Pape a mis l’accent sur la symphonie qui vit de la composition savante des timbres des différents instruments et à travers laquelle chacun apporte sa contribution, parfois seul, parfois uni à un autre, parfois avec tout l’ensemble. «La diversité est nécessaire, elle est indispensable». Mais «chaque son doit concourir au dessein commun. Et pour cela, l’écoute mutuelle est fondamentale», a déclaré le Pape.
Le Saint-Père a relevé «qu’il nous est bon de nous reconnaître dans l’image de l’orchestre, pour apprendre davantage à être Église symphonique et synodale. Je la propose en particulier à vous, membres du Collège cardinalice, dans la consolante confiance que nous avons pour maître l’Esprit Saint: le maître intérieur de chacun et le maître du cheminement commun». Il «crée la variété et l’unité, il est l’harmonie même. Nous nous confions à sa conduite douce et forte, et à la protection prévenante de la Vierge Marie», a conclu le Pape François.
Création des cardinaux
Après l'homélie, le Saint-Père a procédé au rite de création des nouveaux cardinaux. L'un d'eux, le père Luis Dri, un frère capucin confessant depuis des années au sanctuaire de Notre-Dame de Pompei, à Buenos Aires, âgé de 96 ans, n'a pas pu effectuer le déplacement. Il recevra la barrette des mains de l’archevêque de Buenos-Aires.
Chacun des 20 nouveaux cardinaux présents, se mettant en ligne devant le Pape François, ont professé leur foi et juré fidélité et reconnaissance aux saints apôtres de l’Église Romaine. Le Saint-Père a ensuite remis à chacun d'eux la barrette et l’anneau cardinalice.
Désormais, le collège cardinalice compte 242 membres, 138 cardinaux-électeurs en cas de conclave. Parmi les nouveaux cardinaux figurent: deux Français Mgr François Bustillo, l’évêque d’Ajaccio en Corse, et Mgr Christophe Pierre, nonce apostolique aux États-Unis depuis 2016. Trois nouveaux cardinaux sont membres de la Curie. Il s'agit de Mgr Robert Francis Prevost, préfet du dicastère pour les Évêques, Mgr Claudio Gugerotti, à la tête du dicastère pour les Églises orientales, et Mgr Victor Manuel Fernández, nouveau préfet du dicastère pour la Doctrine de la foi.
Figurent également Mgr Stephen Ameyu Martin Mulla, archevêque de Juba au Soudan du Sud, qui a accueilli le Pape en début d’année, mais aussi Mgr Sebastian Francis, archevêque de Penang en Malaisie, engagé et dévoué dans le dialogue interreligieux, et Mgr Pierbattista Pizzaballa qui devient le premier patriarche latin de Jérusalem à obtenir la pourpre.
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