Entre l'Est et l'Ouest, une Hongrie des confluences attend le Pape
Delphine Allaire – Envoyée spéciale à Budapest, Hongrie
Plus de 400 jours après le début de la guerre en Ukraine, le Pape François va-t-il préciser les contours d’une Ostpolitik vaticane renouvelée?
L'occasion est toute trouvée: trois jours, 60 heures, où Ferenc Papa -Pape François en hongrois- prononcera cinq discours et une homélie, exclusivement dans la capitale, pour des raisons d’âge et de santé.
À 300 kilomètres seulement du premier village ukrainien, Budapest est l’un des cÅ“urs battants de l’Europe centrale. L’écho diplomatique de la guerre d'Ukraine y résonnera d'abord lors d’une rencontre avec les autorités politiques hongroises dès le premier jour; à la faveur de discussions privées entre le Saint-Père et le Premier ministre Viktor Orban ainsi que la présidente Katalin Novak, tous deux calvinistes.
Le gouvernement national-conservateur hongrois isolé dans l’Union européenne de par une forme de pacifisme recherche en effet du soutien auprès du Pape, dont les positions publiquement exprimées s’en rapprochent.
Å’cuménisme et accueil des réfugiés
Le défi humanitaire est concomitant. La Hongrie qui partage 100 kilomètres de frontière avec son voisin a accueilli près d’un 1 million d’Ukrainiens en transit. 30 à 40 000 sont restés aux côtés des près de dix millions d’habitants.
Le Pape en rencontrera certains samedi matin en l’église Sainte-Elisabeth de Hongrie; réfugiés ukrainiens, orthodoxes, gréco-catholiques, mais aussi roms, qui représentent 10% de la population et disposent d’une pastorale dédiée au sein de l’épiscopat hongrois. François viendra saluer la petite communauté gréco-catholique, indépendante des latins dans le pays. Fait notable, cette Église martyr témoignera lors de trois événements papaux, avec les évêques, les réfugiés et les jeunes. Des moments qu'accompagnera attentivement le préfet du dicastère pour les Églises orientales, Mgr Claudio Gugerotti, présent dans la délégation papale avec deux autres préfets de la Curie -dicastère pour les Évêques et pour la Communication-.
Une âme européenne
En plein carré d'or des Habsbourg -Vienne, Prague, Cracovie-, Budapest est aussi au carrefour du triangle Rome-Istanbul-Moscou où les influences orientales et occidentales se croisent par-delà le Danube. En cela, les racines chrétiennes du Vieux continent devraient y être réaffirmées. Des racines à la saveur particulière dans cette ville-pont qui regarde aussi vers le Levant, le Caucase et les Balkans.
Malgré une forte identité chrétienne culturelle, -deux tiers des Hongrois sont catholiques-, François vient aussi visiter une Église en voie de sécularisation, qui résiste tant que faire se peut -plus de 4 000 baptêmes l’année dernière. La culture protestante, elle, se perçoit dans les églises réformées et épurées, contrastant avec le baroque habsbourgeois et les reliquats byzantins. À la veille de l’arrivée du successeur de Pierre au pays de saint Étienne, rares sont les signes visuels de la venue du Pape -quelques rues barrées près de l’imposant Parlement néogothique derrière lequel une messe sera célébrée dimanche- mais celle-ci est dans toutes les conversations des locaux. Les transports, eux, ont été rendus gratuits tout le week-end pour permettre au plus grand nombre de prendre part aux différentes rencontres et aux cérémonies du Pape. Peu de pays en tout cas peuvent se targuer de quatre visites pontificales en trois décennies. La Hongrie, oui.
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