Messe pour la Birmanie : l’engagement pour la paix et la fraternité viennent d'en bas
Pope
Au tout début de son homélie, le Saint-Père a invité les fidèles à s’arrêter sur un verbe avec lequel Jésus prie le Père «garder», «alors que votre bien-aimé pays, la Birmanie, est marqué par la violence, le conflit, la répression, nous nous demandons : que sommes-nous appelés à garder ?», a questionné François, qui s’était rendu en Birmanie en novembre 2017, pour entre autres encourager le pays sur la voie de la démocratie.
En premier lieu, a donc continué le Pape, nous sommes invités à garder la foi, «pour ne pas succomber à la douleur et ne pas tomber dans la résignation de ceux qui ne voient plus d’issue». En effet, quand Jésus «sent le poids de l’angoisse de la passion qui s’approche, il ressent l’obscurité de la nuit qui est sur le point de s’abattre sur lui, il se sent trahi et abandonné; mais justement à ce moment-là, même à ce moment-là, Jésus lève les yeux au ciel. Il lève les yeux vers Dieu.» Jésus ne se «laisse pas écraser par la douleur», «ne se replie pas dans l’amertume», «mais il regarde en haut». Garder la foi, a poursuivi le successeur de Pierre, «c’est garder le regard levé vers le ciel pendant que sur la terre l’on combat et l’on répand le sang innocent. C’est ne pas céder à la logique de la haine et de la vengeance, mais rester le regard tourné vers ce Dieu d’amour qui nous appelle à être des frères entre nous.»
La prière, a poursuivi François, «nous soutient dans la bataille quotidienne», elle est «l’unique arme dont nous disposons pour garder l’amour et l’espérance au milieu de tant d’armes qui sèment la mort», «Chers frères et sĹ“urs, a-t-il exhorté, ne cessez pas de regarder en haut. Gardez la foi !».
La division, une maladie mortelle
Ensuite, le Saint-Père s’est penché sur le verbe «˛µ˛ą°ů»ĺ±đ°ů&˛Ô˛ú˛ő±č;±ô’u˛Ôľ±łŮ&±đ˛ął¦łÜłŮ±đ;». «Jésus prie le Père pour qu’il garde les siens dans l’unité. Pour qu’ils soient "un" (Jn 17, 21), une seule famille où règnent l’amour et la fraternité. Il connaissait le cĹ“ur de ses disciples ; il les avait vus quelquefois discuter sur qui devait être le plus grand, qui devait commander.», car la division est «une maladie mortelle». «Nous l’expérimentons dans notre cĹ“ur parce que nous sommes souvent divisés aussi en nous-mêmes ; nous l’expérimentons dans les familles, dans les communautés, entre les peuples, même dans l’Église. Les péchés contre l’unité sont nombreux : les envies, les jalousies, la recherche d’intérêts personnels plutôt que du bien de tous, les jugements contre les autres.»
Et ces petits conflits qui existent entre nous, a déclaré le Saint-Père, «se reflètent ensuite dans les grands conflits, comme celui que vit votre pays en ces jours-ci. Quand les intérêts partisans, la soif de profit et de pouvoir prennent le dessus, des affrontements et des divisions éclatent toujours. La dernière recommandation que Jésus fait avant sa Pâque est l’unité. Parce que la division vient du diable qui est le diviseur.»
Plus de 100 jours après le coup d’État des militaires en Birmanie, le pays est plongé dans le chaos. Le conflit s’enlise, des factions ethniques se soulèvent contre les militaires, et les manifestants sont réprimées dans le sang par les autorités, au moins 780 civils ont été tués ces trois derniers mois, selon l’Association d'assistance aux prisonniers politiques (AAPP).
Chacun peut être batisseur de fraternité
Chacun est donc appelé à garder l’unité, «Je sais que certaines situations politiques et sociales vous dépassent, mais l’engagement pour la paix et la fraternité naît toujours d’en bas : chacun, à son niveau, peut faire sa part», a rappelé François, avant de détailler sa pensée : «Chacun peut s’engager à être, à son niveau, un constructeur de fraternité, à être semeur de fraternité, à travailler à reconstruire ce qui s’est brisé au lieu d’alimenter la violence.»
Enfin, dernier axe de l’homélie du Saint-Père, «garder la vérité», qui ne signifie pas «défendre des idées, devenir gardiens d’un système de doctrines et de dogmes, mais rester liés au Christ et être consacrés à son Évangile.» Garder la vérité, a-t-il poursuivi, «signifie être prophètes dans toutes les situations de la vie, c’est-à-dire être consacrés à l’Évangile et en devenir des témoins même au prix d’aller à contre-courant.» Car parfois, les chrétiens cherchent le compromis, «mais l’Évangile nous demande d’être dans la vérité et pour la vérité, en donnant notre vie pour les autres. Et là où il y a guerre, violence, haine, être fidèles à l’Évangile et artisans de paix signifie s’engager, également à travers les choix sociaux et politiques, en risquant notre vie. Ce n’est qu’ainsi que les choses peuvent changer. Le Seigneur n’a pas besoin de personnes tièdes».
«Je veux porter aujourd’hui sur l’Autel du Seigneur les souffrances de votre peuple et prier avec vous pour que Dieu convertisse les cĹ“urs de tous à la paix», a conclu le Pape. «Et ne perdez pas l’espérance : Jésus prie aujourd’hui encore le Père et intercède pour nous tous, afin qu’il nous protège du malin et qu’il nous libère du pouvoir du mal.»
Les remerciements d’un prêtre birman
En fin de célébration, un jeune prêtre birman a ensuite pris la parole pour remercier le Saint-Père.
«Tous les cĹ“urs de Birmanie débordent de gratitude aujourd'hui. Les mots peinent à traduire le sentiment d'apaisement que cet événement a fait naître dans de nombreux cĹ“urs, en Birmanie», a déclaré le jeune prêtre, tandis que la communauté internationale nous a abandonné, a-t-il continué. «Nous avons été réconfortés, guéris par les paroles du Saint-Père.»
Au cours des trois derniers mois, François a prié plus de six fois pour la paix en Birmanie, a rappelé le prêtre. «Cette messe est une grande occasion de guérison, non seulement pour nous réunis ici, mais aussi pour les milliers de catholiques de Birmanie et de la diaspora birmane, dans le monde entier. Tout le monde a participé en ligne à ce grand événement. Et tous sont immensément reconnaissants pour cette nourriture spirituelle.»
Le jeune prêtre a également tenu a faire part de sa joie quant à la réalisation de cette messe. «Notre peuple mérite mieux. Notre peuple veut la paix. Pour beaucoup en Birmanie, cette messe est un grand miracle. Le Pape, le chef de l'Église catholique, priant avec les habitants d'un petit pays est une chose merveilleuse pour eux. Nous n'oublierons jamais ce geste d'amitié, qui nous parvient à un moment où les défis sont si grands. Continuez à prier pour nous. La paix est possible, la paix est le seul moyen», a-t-il insisté.
Deux religieuses, au nom de la communauté catholique birmane de Rome, ont ensuite offert un tableau au Pape François.
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