En la mĂ©moire du saint CurĂ© d'Ars, le Pape remercie les ±è°ùĂȘłÙ°ù±đČő
Marie Duhamel â Cité du Vatican
En la mémoire liturgique du saint Curé dâArs, le Pape manifeste dans une lettre sa proximité à «ses frères» qui, «sans faire de bruit», ont «tout quitté» pour sâengager auprès de leurs communautés, travaillant «dans la tranchée» en y prenant des risques quotidiennement et «sans se donner trop dâimportance» pour prendre soin du Peuple de Dieu. Le Pape sâadresse à chacun dâeux «qui, si souvent, de manière inaperçue et sacrifiée, dans la lassitude ou la fatigue, la maladie ou la solitude», assument leur mission et écrivent «les pages les plus belles de la vie sacerdotale».
La lettre du Saint-Père sâarticule autour de quatre mots : souffrance, gratitude, courage et louange.
La souffrance des victimes dâabus ; temps de purification pour lâÉglise
La «souffrance» est dâabord celle des «frères victimes dâabus» de pouvoir, de conscience et sexuel de la part de ministres ordonnés. Leur «cri» sâest fait entendre ces derniers temps avec «davantage de clarté», eux qui furent souvent «silencieux et réduits au silence».
Le Pape rappelle le ferme engagement de lâÉglise pour mettre en Ćuvre les réformes nécessaires afin que «la culture de lâabus ne trouve pas dâespace pour se développer et, encore moins, se perpétuer». Il rejette lâomission qui fut, par le passé, une forme de réponse; «nous souhaitons aujourdâhui que la conversion, la transparence, la sincérité et la solidarité avec les victimes deviennent notre manière de faire lâhistoire».
Cette souffrance nâest pas indifférente aux prêtres. Le Pape évoque leur «indignation» et souligne leur sentiment dâimpuissance. «La souffrance quâengendrent la suspicion et la remise en cause a pu provoquer, chez quelques-uns ou beaucoup, le doute, la peur et le manque de confiance». François salue également la mobilisation de certains pasteurs qui «cherchent des mots et des chemins dâespérance».
Sans nier, ni rejeter le dommage causé par quelques-uns, le Pape estime quâil serait «injuste de ne pas être reconnaissant pour tant de prêtres qui, de manière constante et honnête, donnent tout ce quâils sont et ce quâils possèdent pour le bien des autres». Ces prêtres, innombrables, qui font de leur vie une Ćuvre de miséricorde, dans des conditions souvent inhospitalières, même au risque de leur propre vie. «Dans des moments de trouble, de honte et de souffrance», le Pape salue et apprécie leur exemple courageux et constant.
Si les prêtres restent fidèles à la volonté de Dieu, ces temps de purification seront féconds dans un avenir proche, assure François. Le Seigneur est «en train de nous sauver de lâhypocrisie et de la spiritualité des apparences. Il souffle son Esprit pour redonner la beauté à son Epouse, surprise en flagrant délit dâadultère».
«Notre humble repentir, qui reste silencieux, dans les larmes, face à la monstruosité du péché et à lâinsondable grandeur du pardon de Dieu, est le début de notre sainteté», écrit le Pape à ses frères prêtres.
La reconnaissance, une «arme puissante»
Dans les moments «de tribulation, de fragilité (âŠ) de faiblesse et de manifestation de nos limites, quand la pire de toutes les tentations est de rester à ruminer le désespoir», le Pape invite les prêtres -et câest selon lui «crucial»- à revenir à ce «moment lumineux» où ils ont fait lâexpérience de lâappel du Seigneur; «ce point incandescent où la grâce de Dieu mâa touché au début du chemin»; lâétincelle à laquelle chacun peut allumer le feu quotidien et «porter chaleur et lumière» à ses frères.
Il ne faut pas perdre, écrit-il, la mémoire reconnaissante du passage du Seigneur dans leur vie, la mémoire de son regard miséricordieux pour, à leur tour, en témoigner. Le «Oui» à lâappel de Dieu a une portée dont lâimportance est inconcevable.
La reconnaissance est toujours une âarme puissanteâ, explique le Pape. «Ce nâest quâen étant à même de contempler et dâapprécier concrètement tous les gestes dâamour, de générosité, de solidarité et de confiance, ainsi que de pardon, de patience, dâendurance et de compassion avec lesquels nous avons été traités que nous laisserons lâEsprit nous offrir cet air frais capable de renouveler (et non de rapiécer) notre vie et notre mission».
Les remerciements du Pape aux prêtres
Le Pape prend là un long moment pour remercier les prêtres, pour leur fidélité aux engagements pris, alors que la société et la culture actuelle a transformé âle superficielâ en valeur ; pour la joie avec laquelle ils ont donné leur vie, luttant pour que leur cĆur ne sâaigrisse pas mais au contraire sâélargisse avec les années.
François les remercie de leur effort pour renforcer les liens de fraternité et dâamitié entre eux et avec leurs évêques, en se soutenant mutuellement. Rire, pleurer ensemble pour encourager un frère à assumer ses responsabilités ou profiter de sa sagesse. «Combien sont nécessaires ces espaces!» sâexclame François.
Le Pape salue leur témoignage de persévérance et dâendurance dans lâengagement pastoral. Il les remercie de célébrer lâEucharistie et «de faire paître avec miséricorde dans le sacrement de la réconciliation, sans rigorisme, ni laxisme, en prenant en charge les personnes et en les accompagnant sur le chemin de conversion vers la vie nouvelle que le Seigneur offre à tous».
Le Pape se réjouit pour toutes les fois «où, en vous laissant émouvoir jusquâaux entrailles, vous avez accueilli les personnes tombées, soigné leurs blessures en donnant de la chaleur à leurs cĆurs». Pour lui, rien nâest plus urgent que cette proximité.
Le cĆur du pasteur est celui qui a appris «la saveur spirituelle de se sentir un avec son peuple» dont il provient et dont il est au service en adoptant, précise-t-il, un style de vie austère et simple, sans accepter des privilèges qui nâont pas la saveur de lâÉvangile.
Le Pape rend grâce enfin pour la sainteté du Peuple de Dieu. Dans sa constance à aller de lâavant chaque jour, le Pape voit la sainteté de lâÉglise militante. «Laissons-les nous aider et nous encourager par leur témoignage».
Renouveler le courage sacerdotal
Dans cette lettre, le Pape encourage également longuement les prêtres car la mission à laquelle ils ont été appelés, ne les immunise pas contre la souffrance ou lâincompréhension, et que tout le monde a besoin de réconfort.
Le Pape les invite à regarder les problématiques qui sâimposent à eux ou dâailleurs leurs propres limites en face, à les assumer pour laisser le Seigneur les transformer.
Pour connaître leur cĆur, le Pape leur propose un test : voir comment ils réagissent à la douleur : en détournant les yeux et en ignorant lâhomme à terre, en intellectualisant la douleur ou en sâen approchant de manière sélective ce qui ne génère quâisolement et exclusion ? En faisant ainsi, jamais ils ne toucheront leurs blessures, celles des autres et ainsi celles de Jésus.
Le Pape les met également en garde contre «le plus apprécié des élixirs du démon » selon lâexpression de Bernanos, à savoir «la tentation de nous attacher à une douce tristesse». Elle peut naître dâun sentiment de déception vis-à-vis de la réalité quotidienne, de lâÉglise ou de soi-même. Cette tristesse est «nocive». Elle sème le découragement, le sentiment dâabandon et conduit au désespoir. Elle rend «stérile toute tentative de transformation et de conversion en propageant ressentiment et animosité». Si ce sentiment menace, les prêtres sont invités à demander à lâEsprit de venir les réveiller pour les libérer de lâinertie.
Il leur rappelle les Paroles de saint Paul à ses communautés: «Je combats pour que leurs cĆurs soient remplis de courage» pour transmettre la joie de lâÉvangile.
La prière du Pasteur
«Le Seigneur est le premier à prier et combattre pour vous et pour moi». Le Pape insiste sur la force de la prière. Il nâest pas facile de demeurer devant le Seigneur reconnaît François, mais câest à ce moment-là que lâon fait lâexpérience «de notre bienheureuse pauvreté qui nous rappelle que nous sommes des disciples nécessiteux de lâaide du Seigneur et qui nous libère de cette tendance âprométhéenne de ceux qui, en définitive, font confiance uniquement à leurs propres forcesâ.» Dans la prière, Jésus procure le repos à toutes ses brebis, il transforme les fragilités et pousse à la mission. Câest le Seigneur qui montre le chemin dâespérance, et non des «réponses faciles, rapides et préfabriquées», «les recettes et les priorités» déterminées par le prêtre.
Comment maintenir le cĆur courageux ? Il ne faut pas négliger ni son rapport avec Jésus, ni lâaccompagnement spirituel. Le Pape les encourage à avoir un frère avec qui se confronter, discuter et discerner en pleine confiance et transparence ; avec qui vivre lâexpérience de se savoir disciple. Câest une aide «irremplaçable».
Le Pape leur demande également de faire croître et dâalimenter le lien avec leur peuple, sans sâisoler ou, pire, se cloîtrer dans des groupes élitistes, mais en se mettant en sortie. Devant lui pour le guider, à ses côtés pour le comprendre et derrière lui pour le maintenir uni et parce quâil a «un sens de lâodorat dans la recherche de nouveau chemin pour marcher».
«La douleur de tant de victimes, du peuple et la nôtre ne peut être vaine». Le Pape souhaite que les prêtres manifestent leur proximité à ceux qui souffrent, et pourquoi pas, pour vivre la misère humaine comme la leur pour les faire eucharistie. «Notre temps, marqué par de vieilles et de nouvelles blessures nécessite, juge le Pape, que nous soyons artisans de relation et de communion, ouverts, confiants et attendant la nouveauté que le Royaume de Dieu veut susciter aujourdâhui».
Louange
La dernière parole-clé de cette lettre est la louange. On ne peut parler de gratitude et dâencouragement sans contempler Marie qui «nous enseigne la louange capable dâouvrir le regard à lâavenir et de rendre lâespérance au présent». Se tourner vers Marie est recommencer à croire en «la force révolutionnaire de la tendresse et de lâaffection».
Pour cette raison, explique François, «si jamais le regard commence à sâendurcir, ou si nous sentons que la force séductrice de lâapathie ou de la désolation veut sâenraciner et sâemparer du cĆur ; si (âŠ)nous nous sentons poussés vers une attitude élitiste (âŠ) si parfois nous sommes tentés de nous isoler (âŠ) ou si la lamentation, la plainte, la critique ou lâironie sâemparent de nos actions sans aucun désir de se battre, dâespérer et dâaimerâŠregardons Marie pour quâelle nettoie notre regard de toute poussièreâ qui peut nous empêcher dâêtre attentifs et éveillés pour contempler et célébrer le Christ qui vit au milieu de son Peuple.»
En guise de conclusion, le Pape rend, une fois de plus, grâce aux prêtres pour leur dévouement et leur mission. «Laissons la gratitude susciter la louange et nous encourager une fois encore dans la mission de consacrer nos frères dans lâespérance ». Il les invite à être des hommes qui témoignent par leur vie de la compassion et de la miséricorde que Jésus seul peut offrir.
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