Il y a 80 ans, l’élection du Pape Pie XII (1876-1958)
Manuella Affejee- Cité du Vatican
Après seulement un jour de conclave, la fumée blanche s’échappe de la cheminée de la chapelle Sixtine; et résonne depuis le balcon de la Loggia centrale de la Basilique Saint-Pierre, la phrase tant attendue: «annuntio vobis gaudium magnum: habemus Papam!», sous les applaudissements nourris d’une foule en liesse. À 63 ans, le cardinal Eugenio Pacelli accède au Siège de Pierre et prend le nom de Pie XII, en hommage à son prédécesseur Pie XI, dont il fut l’un des plus proches collaborateurs.
Une carrière diplomatique au service du Saint-Siège
Son élection ne fut pas une surprise; le choix de ce cardinal italien semblait aller de soi. Issu d’une famille d’avocats très liée au Saint-Siège, Eugenio Pacelli, -ordonné prêtre en 1899, nommé archevêque en 1917-, montre très vite ses talents pour la diplomatie. Nommé nonce à Munich par Benoît XV, il est le témoin direct de l’effondrement de la République de Weimar, du climat délétère qui règne alors, -il sera menacé par des révolutionnaires bolchéviques-, et de la montée en puissance du nazisme. Lors de cette période en terre allemande, il sera l’artisan des concordats avec la Bavière et la Prusse.
En 1929, Pie XI le rappelle à Rome, et le choisit comme secrétaire d’État. C’est en cette qualité qu’il effectuera plusieurs voyages, comme représentant du Souverain Pontife lors de congrès eucharistiques en Argentine, en Hongrie, ou de célébrations en France (Lourdes en 1936, et Lisieux en 1937). Il se rendra même aux États-Unis, où il rencontrera à titre privé le président Franklin Roosevelt. En 1937, devant le non-respect par Hitler du concordat signé en 1933, Pie XI demande au cardinal Pacelli de rédiger, de concert avec l’archevêque de Munich, une encyclique: Mit Brennender Sorge (Avec une brûlante inquiétude). Exceptionnellement écrite en allemand et non en latin, le texte condamne le nazisme et affirme son incompatibilité avec le catholicisme. L’encyclique est distribuée dans les paroisses allemandes et lue en chaire le jour des Rameaux.
Un Pape dans les affres de la guerre
C’est donc dans un contexte délicat et tourmenté qu’il sera élu Pape, succédant à Pie XI, (mort le 10 février 1939). Son pontificat débutera pratiquement avec la Seconde Guerre mondiale. Devant l’imminence de la catastrophe qui s’apprête à embraser l’Europe et le monde, le Souverain Pontife adresse un message solennel aux peuples et aux gouvernants : «Une heure particulièrement grave vient de sonner pour la grande famille humaine l’heure de délibérations redoutables dont Notre cÅ“ur ne peut se désintéresser, comme ne le doit pas l’autorité spirituelle qui Nous vient de Dieu pour conduire les âmes sur les voies de la justice et de la paix.(…) Le danger est imminent, mais il est encore temps. Rien n’est perdu avec la paix. Tout peut l’être avec la guerre. Que les hommes recommencent à se comprendre ». Ses appels ultérieurs aux belligérants ne seront guère plus écoutés.
Le Pape s’engage pour venir en aide aux réfugiés, aux affamés, aux victimes de la guerre, ainsi qu’aux juifs persécutés. Rompant avec le protocole, il n’hésitera pas à sortir des murs du Vatican pour se rendre dans le quartier de San Lorenzo, cible de violents bombardements, pour prodiguer aide et réconfort à la population. Le cardinal Giovanni Battista Montini (futur Paul VI) qui était à l’époque substitut à la Secrétairerie d’Etat du Saint-Siège, est aussi présent sur les lieux du drame.
Après la guerre, Pie XII s’engage avec vigueur dans la lutte contre l’idéologie communiste qui se répand en Europe. La suite du pontificat sera riche en documents, et marquée, entre autres, par la proclamation du dogme de l’Assomption de la Vierge Marie, ou encore par l’annonce de la découverte de la tombe de Saint Pierre.
Celui qu’on surnommait «le Pape de l’humanité souffrante» s’éteint à Castel Gandolfo à la suite d’une longue agonie.
L’ouverture des fonds archivistiques permettra sans nul doute de mieux connaître ces 19 ans de pontificat, l’un des plus troublés du XXe siècle.
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