Le Pape appelle les consacrés de Lituanie à être des témoins de la miséricorde de Dieu
Cyprien Viet – Cité du Vatican
Sortant très largement de son texte, l’évêque de Rome a développé une longue méditation de plus de 45 minutes, évoquant l’histoire spécifique de l’Église en Lituanie, et notamment tous ces «martyrs anonymes» dont les lieux de sépulture ne sont même pas connus. «Vos pères ont souffert, ont lutté, ont été emprisonnés» a expliqué le Pape, saluant avec une émotion particulière les religieux les plus anciens présents dans la cathédrale, certains ayant connu l’expérience douloureuse de la prison à l’époque soviétique.
Aujourd’hui pourtant, de nouveaux dangers menacent les prêtres et consacrés. Ce ne sont plus les dictateurs qui persécutent, mais un mal plus insidieux fait beaucoup de dégâts : «L’esprit de sécularisation et d’ennui», qui éteint l’espérance, qui affadit l’amour ressenti lors du premier appel. «Nous ne sommes pas des fonctionnaires», a répété plusieurs fois le Pape, invitant à ne pas vivre sur une logique d’horaires administratifs, mais au contraire selon «une vie d’amour», en passant beaucoup de temps devant le tabernacle, en tête-tête avec le Seigneur, et aussi beaucoup de temps avec les gens, sans économiser ses forces.
«Peut-être la “société de bien-être” nous a-t-elle trop rassasiés, remplis de services et de biens, et nous nous retrouvons “alourdis” de tout mais remplis de rien ; peut-être nous a-t-elle rendus étourdis ou dissipés, mais non pas remplis», s’est interrogé François, invitant les prêtres et religieux à ne pas se morfondre sur leurs propres fragilités ou frustrations. «Écouter la voix de Dieu dans la prière nous fait voir, entendre, connaître la souffrance des autres afin de pouvoir les libérer. Mais nous devons également être touchés quand notre peuple a cessé de gémir, a cessé de chercher l’eau qui étanche la soif. C’est un moment aussi pour discerner ce qui anesthésie la voix de nos gens», a averti François.
La résilience dans la foi
Le Pape a rendu ainsi hommage aux plus anciens : «La violence dont vous avez été l’objet pour avoir défendu la liberté civile et religieuse, la violence de la diffamation, la prison et la déportation n’ont pas pu vaincre votre foi en Jésus-Christ, Seigneur de l’histoire. C’est pourquoi vous avez beaucoup à nous dire et à nous apprendre, et aussi beaucoup à proposer, sans avoir à juger l’apparente faiblesse des plus jeunes», auquel le Pape a lancé cet appel : «Vous, les plus jeunes, quand, devant les petites frustrations qui vous découragent vous avez tendance à vous renfermer, à recourir à des attitudes d’évasion qui ne sont pas cohérentes avec votre consécration, recherchez vos racines et regardez la route parcourue par vos aînés. Il vaut mieux que vous preniez une autre route, plutôt que de vivre dans la médiocrité. La porte est ouverte », a déclaré le Pape avec une certaine fermeté.
«Nous sommes tous sur la barque de l’Église, cherchant toujours à crier vers Dieu, à être persévérants au milieu des tribulations et à garder le Christ Jésus comme objet de notre espérance. Et cette barque reconnaît au centre de sa mission l’annonce de cette joie espérée, qui est la présence de Dieu au milieu de son peuple dans le Christ ressuscité, et qui un jour, attendu avec impatience par toute la création, se manifestera dans les enfants de Dieu», a expliqué François, invitant les consacrés lituaniens à une vie humble et fraternelle : «seul notre exemple de vie rendra compte de notre espérance en Lui», a-t-il expliqué.
Une miséricorde infinie et inconditionnelle
Après la fin de son discours officiel, François a prolongé son intervention quelques minutes, en invitant une nouvelle fois les prêtres à être des témoins infatigables de la miséricorde de Dieu, et à ne pas confondre le confessionnal avec un cabinet de psychiatre, où l’on fouillerait les moindres petits secrets de l’intimité des gens. Il ne faut chasser personne, mais au contraire, faire comprendre que «Dieu pardonne tout».
S’adressant enfin aux religieuses, le Pape les a invitées à éviter les bavardages et les médisances, donnant l’exemple d’une religieuse qu’il venait de saluer, et qui en prison, n’avait probablement pas eu beaucoup le temps de bavarder. Il a invité les ˛ő˛ŐłÜ°ů˛ő à être des icônes de la Sainte-Vierge et de «la maman-Église», qui «n’est pas une vieille fille, qui ne bavarde pas. Elle aime, elle sert, elle fait grandir.»
François a conclu en invitant tous les prêtres et les consacrés à soigner leurs temps d’intimité avec le Seigneur, afin de garder toujours une «âme pleine de tendresse, de douceur, de miséricorde, d’amour, de paternité et de maternité».
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