Que reste-t-il de l’Etat islamique?
Marine Henriot – Cité du Vatican
Revendication d’un attentat à Damas le 11 mai, prise de la ville de Tidermène au Mali en avril, dix personnes tuées dans l’attaque d’une église en janvier dans le Nord-Kivu en RDC… Malgré l’anéantissement de ses chefs successifs et la perte de son proto-état en Irak et en Syrie, le groupe terroriste n’est pas pour autant éteint et continue de souffler sur les braises d’un ressentiment anti-occidental transnationalisé, profitant du prestige de son califat défait.
Dans son essai à paraitre le 1er juin aux éditions CNRS, , Myriam Benraad, professeur en relations internationales à l’Université Schiller à Paris, propose une réflexion sur les causes profondes de la chute de l’organisation administrative de Daesh et éclaire sur son pouvoir de séduction et sa force de frappe actuels.
Invisible mais puissant, Daesh fructifie ses racines et cultive le ressentiment d’une frange de la population, «Si l'on parle du Moyen-Orient, le ressentiment tout d'abord face au leg de l'intervention militaire américaine en Irak, puisque je rappelle que ce groupe est né initialement sur le terrain irakien dans le contexte de l'occupation américaine dans ce pays», explique l’auteure, spécialiste de l’Irak.
Sur le continent africain, les djihadistes salafistes progressent notamment dans les pays où ont combattu les forces françaises et sur les territoires où règnent guerre civile et conflit intercommunautaires. «Il y a le sentiment de revanche contre des conditions socio-économiques, contre un sentiment d'exclusion, de discrimination.», nuance Myriam Benraad, avant de préciser que la dimension politique et idéologique reste centrale pour les aspirants au djihad de Daesh, «beaucoup, à travers le djihad, se politisent et veulent servir une cause.»
Un futur califat en Afrique?
«Puisant son inspiration et son orientation dans un registre salafiste-jihadiste, le groupe terroriste n’a jamais eu pour but de réformer les systèmes établis mais plutôt de les anéantir au nom de son utopie.», explique l’auteure dans son essai. Fort de cette idéologie et d’une communication triomphaliste, l’EI tisse des alliances avec des groupes terroristes locaux, notamment en Afrique et développe, à l’image de l’Etat Islamique au grand Sahara (EIGS), des branches locales de son groupe.
Une stratégie qui peut certes permettre à l’organisation d’asseoir son pouvoir de manière locale, mais qui selon Myriam Benraad ne permettrait pas actuellement de créer un nouveau califat, «l'Afrique est suffisamment divisée sur le plan politique et communautaire, il me paraît ainsi difficile d'y voir l'émergence, encore une fois à court et moyen terme, d'un califat sur le modèle de ce qu'on observe au Moyen-Orient.»
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