蜜桃交友

Stanislas Kambashi, SJ – Cité du Vatican

«Solidaire avec les populations du Grand Kivu, victimes des conflits sanglants et contraintes au déplacement massif, porté par "l’espérance qui ne déçoit pas" (Rm 5,5), j’offre cette Eucharistie pour implorer la paix dans la partie Est de notre Pays, la RD Congo». Le cardinal Ambongo a ainsi introduit l’homélie de cette messe célébrée en la cathédrale Notre-Dame du Congo. De nombreux fidèles ont pris part à cette célébration, dont des étudiants, membres du Mouvement International des Étudiants Catholiques (MIEC) et des membres du gouvernement congolais. Dans son homélie, l’archevêque de Kinshasa est essentiellement revenu sur la situation dramatique de l’Est de son pays, tout en soulignant à la nécessité de passer des discours aux actes.

Une tragédie aux conséquences incalculables

«Depuis 30 ans, les conflits armés dans notre pays causent une tragédie aux conséquences incalculables». Un drame qui est exacerbé par des tristes événements qui ont conduit à la prise de la ville de Goma et d’autres localités de l’Est de la RDC par le groupe armé M23 et ses alliés rwandais, occasionnant plus 3 000 morts et de considérables dégâts matériels. La crise sécuritaire et humanitaire qui s’est créée est également sans précédent, a constaté le prélat congolais. Face à un tel spectacle horrible et macabre, l’archevêque de Kinshasa a fait part de son indignation et invité à prier «pour les victimes, pour les blessés, pour nos vaillants soldats, ainsi que pour le retour de la paix». Il a exhorté à se tourner vers le Seigneur afin qu’Il touche les c?urs des protagonistes de ces conflits persistants, pour qu’ils deviennent des artisans d’une paix durable et véritable au Congo et dans toute la région des Grands Lacs.

Aller en profondeur pour restaurer la nation congolaise

Commentant les lectures de ce cinquième dimanche du Temps ordinaire, et méditant sur la première lecture extraite du livre d’Isaïe, le cardinal Ambongo a fait remarquer que «même une "terre de désolation" peut se transformer en une "terre remplie de la Gloire de Dieu"». De même, la deuxième lecture enseigne qu’un persécuteur comme Paul peut être transformer en bâtisseur de paix, car Dieu a le pouvoir de changer le mal en bien et le désespoir en joie. Comme les disciples, Jésus nous invite aussi à aller au large, en profondeur, ce qui signifie «analyser et discerner des problèmes ou des mobiles qui nous divisent, et nous dressent les uns contre les autres, à la lumière de la Parole de Dieu qui éclaire nos consciences». L’appliquant au contexte de son pays, l’archevêque estime qu’«il s’agit d’aller en profondeur de nos vies, de nos consciences, de notre identité des Congolais en vue d’opérer la pêche miraculeuse qui peut restaurer la nation». C’est pour cela qu’il ne faut pas désespérer, a-t-il déclaré.

«RD Congo restera une et indivisible»

Parlant des initiatives en faveur de la paix en RDC, le cardinal Ambongo a constaté que beaucoup d’entre elles «se sont soldées par des échecs cuisants». À son avis, ces revers sont liés «à la complexité des causes de ces conflits, notamment des revendications identitaires, des appétits économiques et des velléités expansionnistes de certains pays voisins au nôtre». La situation se complexifie davantage car ces voisins sont soutenus par des Multinationales et sous-traitent des complicités internes, et la communauté internationale reste impuissante face à cette réalité. L’archevêque de Kinshasa a rappelé que les évêques du Congo ont dénoncer tout cela depuis des années, «tout en rappelant que la RD Congo restera une et indivisible».

Adhérer au pacte social pour la paix et le bien vivre-ensemble proposé par la CENCO et l’ECC

Face au drame humanitaire, le prélat exhorte différents acteurs à aller en profondeur et à quitter la superficialité et la médiocrité. Comme les apôtres ont tout abandonné et suivi Jésus après la pêche miraculeuse, l’archevêque exhorte à délaisser tous les intérêts égoïstes pour construire la paix. «Même si pendant 30 ans, nous avons peiné sans parvenir à la paix et à la refondation de l’État, si nous écoutons le Christ, nous pouvons sortir de notre désespoir et de notre misère». Pour la RDC, estime le cardinal Ambongo, «la pêche miraculeuse peut se produire si nous adhérons notamment au pacte social pour la paix et le bien vivre-ensemble proposé par la CENCO et l’ECC». Cet appel des Églises catholiques et protestantes qui demandent aux belligérants d’abandonner les armes et de s’asseoir pour rechercher des solutions aux revendications par le dialogue, et selon la palabre africaine, est une autre manière d’aller en profondeur. Avancer au large, c’est aussi «suivre la voie de la coopération transfrontalière avec tous les pays voisins pour des intérêts gagnant-gagnant, sans nuire à qui que ce soit», a poursuivi le cardinal. Il a appelé la communauté internationale à avoir le courage d’aller au-delà de simples déclarations et à engager toute son influence pour la restauration de la paix en RD Congo.

«La nation est en danger! Chaque minute est cruciale»

Pour la restauration de la paix en RDC, le cardinal Ambongo estime que le pacte social pour la paix et le bien vivre-ensemble proposé par la CENCO et l’ECC peut servir de guide. Ce projet, a-t-il souligné, a l’avantage de faire passer «de la haine à l’amour, de la volonté de puissance ou de vengeance vers la paix». Tout en appelant à vivre ensemble dans le respect, la tolérance et la bienveillance, ce pacte invite aussi à faire un «minutieux diagnostic de notre pays pour repartir du bon pied». Chaque Congolaise et Congolais doit accepter de taire son égo, de freiner ce qui peut diviser, «pour s’engager à reconstruire l’unité et la cohésion nationale, autour non pas de personnes, mais d’un idéal commun. La nation est en danger! Chaque minute est cruciale. Ne perdons plus du temps, si nous voulons sauver le Congo».

Les étudiants du MIEC, artisans de paix et d’unité

A la fin de son homélie, le cardinal Ambongo a remercié les étudiants du MIEC pour leur initiative à organiser cette messe, signe de l’importance qu’ils accordent l’intégrité du territoire du pays, à l’unité nationale, à la paix et au bien vivre-ensemble. Il les a invités à transformer leurs milieux de vie et d’études en ateliers du bien vivre ensemble, «en devenant des artisans de la paix, de la tolérance, de la vérité et de la justice». En cette année jubilaire, l’archevêque de Kinshasa a invoqué le don de la paix véritable pour son pays. Il a prié pour que l’Esprit du Seigneur inspire les sentiers de la Paix et soutienne les engagements des Congolais en faveur de l’unité et du développement de leur Nation.

Après la prise de Goma, capitale de la province du Nord-Kivu, par le groupe armé M23 («Mouvement du 23 mars») et les troupes rwandaises début février, l’invasion tend à installer dans la province voisine du Sud-Kivu, menaçant désormais sa capitale, Bukavu. Samedi 9 février, un sommet de la Communauté des États d'Afrique de l'Est (EAC) et de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) a notamment appelé à un cessez-le-feu sous les cinq jours dans cette partie de la RDC.