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RĂ©union annuel des Ă©±ąĂޱçłÜ±đ˛ő de la province de Bukavu Ă  Butembo en avril 2024. RĂ©union annuel des Ă©±ąĂޱçłÜ±đ˛ő de la province de Bukavu Ă  Butembo en avril 2024. 

RDC: dans le diocèse de Butembo-Béni, un calme relatif

Au Nord-Kivu en République démocratique du Congo, l'évêque de Butembo-Béni assure que son diocèse n'est pas en proie aux pillages et aux destructions. Il espère que l'initiative entre les responsables catholiques des différents pays de la région permettra de trouver une solution à la crise sécuritaire dans le pays.

L'Osservatore Romano

Cela semble presque un miracle. Les prêtres sont encore à leur place, seules deux paroisses sur 70 ont été attaquées par des groupes armés, des fidèles sont encore présents pour soutenir comme ils le peuvent l’Église locale. Pourtant, en théorie, il ne devrait pas en être ainsi car le territoire du diocèse de Butembo-Beni s’étend sur 45.000 km2 au Nord-Kivu, l’une des 26 provinces de la République démocratique du Congo, pays d’Afrique centrale déchiré par la guerre civile et anéanti par une urgence humanitaire sans précédent sur tout le continent. Ce devrait être comme dans d’autres zones du sud et de l’est, où les groupes armés soutenus par le Rwanda, qui combattent contre les forces gouvernementales et même entre eux, tuent, pillent, détruisent. Sans se soucier de personne.

Apprendre que la célébration des sacrements et les activités pastorales n’ont pas subi de heurts ou de changements pourrait toutefois sembler étrange si l’on n’analysait pas en détail le cadre de la situation que l’évêque diocésain dresse pour «L’Osservatore Romano»: «Seule une petite partie de mon diocèse a été occupée par les rebelles du mouvement M23 qui arrivent du sud. Pour le reste, il y a une crainte, mais aussi un calme relatif dû à la présence des soldats de l’Ouganda qui, depuis 2021, après le protocole d’accord signé avec notre gouvernement, ont rejoint l’armée régulière congolaise pour combattre les paramilitaires. Leur intention déclarée est de défendre les civils et, jusqu’à présent, ils n’ont jamais blessé personne».

Des conditions de vie normales

Si Mgr Melchisedec Sikuli Paluku doit se rendre dans un village pour une confirmation, il y va sans problème, et si le manque de sécurité ne le permet vraiment pas, il délègue l’un de ses vicaires épiscopaux. «Les conditions dans lesquelles nous vivons notre foi, pour le moment, sont normales. Par exemple, cette année, nous rappelons les deux premiers évêques du diocèse, mes prédécesseurs: une occasion d’inviter les fidèles à prier encore plus».

Et même si ce calme surréel pourrait bientôt fondre comme neige au soleil parce que le diocèse de Butembo-Beni est sous l’emprise des groupes armés qui arrivent du nord-est et du sud, le prélat n’a pas voulu manquer l’occasion de préparer chaque chrétien à vivre le Jubilé de la meilleure façon possible:

“Toute notre pastorale est centrée sur l’espérance, le fil conducteur de cette Année Sainte. Nous essayons de suivre le calendrier des grands événements. De nombreux groupes, associations et mouvements se rendent à la cathédrale du siège épiscopal pour vivre pleinement le Jubilé. Nous envisageons également d’organiser un pèlerinage à Rome, mais nous devons comprendre comment faire pour obtenir les visas nécessaires.”

Une initiative entre responsables catholiques

Les signes d’espérance ne finissent pas là. D’autres, considérés comme providentiels, sont les ordinations de 23 diacres qui se dérouleront le 27 février et le 2 mars. «Ce sont des événements qui manifestent la vivacité de l’Église, même à un moment si douloureux. Je ne peux vraiment pas me plaindre quand je vois que les fidèles prient avec tant de ferveur malgré la douleur et la pauvreté».

L’optimisme et l’espérance de l’Église se constatent également sur le plan diplomatique. Les évêques ont lancé une initiative -à laquelle ont également adhéré les responsables protestants- à travers laquelle faire dialoguer les parties opposées pour tenter de mettre fin à un conflit insensé: «Pour moi, comme pour beaucoup d’autres, cet effort représente l’unique issue concrète. Quand tous les contacts appropriés auront été établis, une rencontre sera organisée pour chercher à comprendre ce que l’on peut faire pour construire la paix, non seulement dans notre pays, mais dans toute la région».

Entre-temps, assure encore Mgr Melchisedec Sikuli Paluku, un premier sommet «pourrait déjà se dérouler dans les prochains jours au Kenya ou en Tanzanie, entre notre cardinal Fridolin Ambongo Besungu, archevêque de Kinshasa, l’archevêque de Kigali, au Rwanda, le cardinal Antoine Kambanda, et le président de l’Aceac, l’association des Conférences épiscopales d’Afrique centrale, Mgr Marcel Madila Basanguka, archevêque émérite de Kananga. L’objectif est de trouver une solution commune avec les chefs d’État et de gouvernement. Et il faut faire vite».

De nombreux déplacés

De même qu’il faudra immédiatement trouver une solution pour des déplacés internes qui fuient les combats pour sauver leur vie. «À Butembo-Beni, un grand nombre sont arrivés et il en arrive encore. Il est impossible d’établir un nombre précis». Les organismes caritatifs de l’Église locale font l’impossible pour apporter leur aide, en collaboration avec les agences internationales, mais cela ne suffit certainement pas. «Quand les déplacés arrivent ici chez nous, ils sont accueillis par leur famille ou par des gens de bonne volonté, mais tous finissent par vivre dans la précarité».

Pourtant, un étranger qui visiterait Butembo ne s’apercevrait pas de ces difficultés, il aurait l’impression que, tout compte fait, la population ne vit pas si mal. «Les gens d’ici font preuve de résilience et tout cela est admirable. Mais c’est ainsi depuis très longtemps. Je suis évêque depuis désormais 26 ans, et la situation du pays a toujours été plus ou moins la même: guerres, conflits, insécurité». Et le comportement des groupes armés n’a jamais changé lui non plus: «Ils prétendent vouloir aider la population, mais ensuite, quand ceux qui les soutiennent cessent de les financer, ils se transforment en voleurs et en assassins». Au fond, à chaque fois, c’est toujours la même histoire qui se répète, dans l’indifférence de la communauté internationale.

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22 février 2025, 17:27