Dimanche de la mer: les aumĂ´niers de Marine, missionnaires insubmersibles
Vianney Groussin – Cité du Vatican
Les ravitailleurs, les frégates, les porte-hélicoptères et même le porte-avions Charles de Gaulle: à 54 ans le père Pierre Fresson a tout connu dans son ministère d’aumônier embarqué. Il est aujourd’hui aumônier national de la Marine, loin du Golfe de Guinée ou de l’Océan Indien qu’il a sillonné plus d’une fois. «La vie d'un aumônier ressemble beaucoup plus à celle d'un missionnaire qu'à celle d'un curé de paroisse» explique-t-il, «puisque la communauté varie beaucoup, elle change au fur et à mesure des missions et elle-même n'est pas très stable puisqu'elle dépend des missions des équipages. Donc l'aumônier arrive dans un lieu et auprès d'un équipage qui ne se présente pas du tout comme une paroisse, mais bien plutôt comme une réalité missionnaire dans laquelle il est envoyé».
À disposition de tous
En effet, la Marine française met à disposition des aumôniers pour les militaires qui partent en mission, afin qu’ils puissent continuer à vivre leur foi. Mais comme le précise le père Fresson, «l'aumônier est à disposition de tous. Bien-sûr, pour les catholiques, il apporte la vie sacramentelle, il apporte ce qu'un catholique est en droit d'attendre d'un pasteur. […] Et puis, il est à la disposition de tous pour les questions morales, spirituelles que chacun rencontre et qui sont particulièrement denses lorsque les militaires sont en opération, qu’ils sont envoyés dans les lieux les plus difficiles, les plus violents que sont les théâtres de guerre». Les missions, qui durent souvent plusieurs mois, sont des épreuves pour les équipages qui se retrouvent coupés du monde en-dehors des rares escales, et loin de leurs familles avec des moyens de communication limités.
Les «padrés» comme on les appelle, sont donc souvent des confidents pour tout l’équipage, puisqu’ils ont aussi un statut particulier hors de la hiérarchie, explique le père Fresson: «on parle de grade ’’miroir’’, c'est à dire que l'aumônier est du grade de la personne avec laquelle il parle, ce qui permet d'éviter tout surplomb dans la relation. Donc on peut s'ouvrir à l'aumônier de toutes les questions qu'on porte dans la confidentialité, sans rapports hiérarchiques». Pour autant, il est totalement intégré à la vie de l’équipage, et vit et travaille comme un marin à bord.
Une foi de marin
Mais alors à quoi ressemble la foi d’un marin ? C’est avant tout une foi de militaire, répond le père Fresson: «il y a une particularité par le fait militaire déjà, une sorte de dualité entre l'état militaire et la vie d'Église, puisqu’on connaît une hiérarchie, on connaît les rituels, l'importance des traditions, le sens du sacrifice, le don de soi… Il y a un certain nombre de valeurs qui sont bien évidemment aussi celles de nos armées».
Ensuite la mer, l’océan, ne laissent pas indifférents les marins qui l’arpentent des jours durant :
Le marin n’est donc pas un catholique comme les autres, il est aussi celui qui expérimente la solitude et l’éloignement permanent, image du caractère éphémère de la vie terrestre: «II y a ce rapport à la mer, à l'absence, qui fait de lui d'une certaine forme un nomade, là où la plupart de nos contemporains se reconnaissent plutôt comme des sédentaires. La «nomadité» fait partie de la vie du marin: partir, revenir, être absent avec la douleur de l'absence, mais aussi avec la joie du départ, la joie de la rencontre, de la découverte… Donc il y a toujours un petit côté aventurier chez le marin».
Enfin pour le père Fresson, l’imaginaire commun des marins et les nombreuses références que partagent un équipage sont un moyen idéal de faire comprendre le message de l’Évangile: «Il y a beaucoup de mots de marins qui peuvent s'appliquer aux réalités spirituelles, ça leur donne une consistance et une dimension expérimentale qui permet d'enraciner plus profondément la foi vécue du marin».
Message du Cardinal Czerny
Dans son message pour le dimanche de la mer, le cardinal Czerny, préfet du dicastère pour le Service du développement humain intégral, a rappelé que «la navigation peut entraîner une absence du domicile et de la terre pendant des mois, voire des années. Les marins et leurs familles peuvent manquer des moments importants de la vie de l’autre». «Le dimanche de la mer donne de la visibilité à leur quotidien inconnu» s’est-il réjoui.
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