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Le Cardinal Fridolin Ambongo, archevêque de Kinshasa (RDC) et président du Symposium des conférences épiscopales d'Afrique et Madagascar (Sceam) Le Cardinal Fridolin Ambongo, archevêque de Kinshasa (RDC) et président du Symposium des conférences épiscopales d'Afrique et Madagascar (Sceam) 

JMJ 2023: une belle célébration de fraternité malgré une faible participation de l’Afrique

Saluant au terme des JMJ 2023, «l’enthousiasme et la joie de vivre le Christ» de plus d’un million de jeunes venus du monde entier autour du Pape à Lisbonne au Portugal, le cardinal Fridolin Ambongo archevêque de Kinshasa en République démocratique du Congo et président du Sceam a regretté, dans un entretien accordé à Pope, «une faible participation de la jeunesse Africaine».

Françoise Niamien - Envoyée spéciale à Lisbonne (Portugal)

Après les expériences de la 37ème édition de la Journée mondiale de la jeunesse qui se sont tenues à Lisbonne du 1er au 6 août 2023, le cardinal Fridolin Ambongo a exprimé sa satisfaction face à l’enthousiasme des jeunes participants à ces JMJ. Il a souligné que les jeunes sont un signe d’espérance et l’avenir de l’Église. Il les a invités à se lever et à témoigner de la miséricorde de Dieu. Le président du Symposium des conférences épiscopales d’Afrique et Madagascar (Sceam) a également mis en évidence l’importance de la formation des jeunes pour consolider leur foi catholique. Il a exprimé son sentiment de gratitude pour la petite minorité des jeunes africains qui ont rendu visible le visage de l’Afrique aux JMJ. Il a aussi fait part de son regret car beaucoup de jeunes africains n’ont pas pu participer à ce rendez-vous mondial, à cause des difficultés liées aux visas.

Qu'est-ce qui vous a véritablement marqué au cours de ces journées ?

C'est tout simplement ce grand enthousiasme de ces jeunes, leur joie dans la communion et la fraternité qui m’ont véritablement impressionné. J’ai vu une jeunesse fière d'appartenir à l'Église. 

Voir cette masse de jeunes enthousiastes, venus de tous les coins du monde, on se croirait au matin de la Résurrection, la Pâque du Christ. D’autre part, c’est l’expression de l’universalité de l’Église qu’ils ont affichée aux yeux du monde entier. 

Le fait de voir cette jeunesse enthousiaste et joyeuse, cela est-il suffisant pour la qualifier de force pour l’Eglise, capable d’assumer son avenir ? 

Nous avons vu des jeunes qui sont fiers d'être catholiques. Capables d’afficher leur foi partout où ils seront. Pour moi, c'est vraiment une condition indispensable pour l'avenir de notre Eglise. 

Naturellement, il nous appartient, nous, pasteurs, de les accompagner pour que cet enthousiasme, je dirai, cet amour du Christ ne s'arrête pas seulement au niveau émotionnel, ou au niveau superficiel, mais qu'elle soit pour ces jeunes une occasion d’approfondissement de leur foi et l'exigence de la vivre dans des contextes aussi variés que ce que nous montre notre société d'aujourd'hui. 

L’enthousiasme des jeunes européens à ces JMJ n'est-il pas un témoignage pour le vieux continent?

Cet enthousiasme de la jeunesse est un message fort pour le vieux continent. On est habitué à l'idée que l'Église n'y a plus d'avenir, que l’Eglise d’Europe est en train de mourir. Certes les églises se vident, la foi est vacillante. Toutefois, l’enthousiasme et la joie de ces jeunes européens qui étaient à mon avis les plus nombreux pendant ces JMJ ont démontré qu’il y a de l’espoir à nourrir.

Il faut tout simplement arriver à maintenir cet enthousiasme, cette flamme d’amour pour le Christ en leurs cÅ“urs. Ils sont une grande source d’espérance. Les voir défiler dans les rues de Lisbonne, drapeaux en main, avec joie et bonheur nous interpelle pour dire non à une conception d’une «Eglise vieillissante». L’Église n'est pas vieillissante. Elle reste l’Église plus de 2000 ans après.

Tant que les jeunes sont là, il y a de l'avenir. C’est le premier enseignement.

Le deuxième enseignement, le témoignage de cette joie des jeunes autour du Pape démontre que l’Eglise tout comme la société a besoin de la jeunesse. Et dans un continent, avec une politique de limitation drastique des naissances, cet enthousiasme est une interpellation pour tous ces décideurs. Le monde a besoin de vivre et il y arrivera par la jeunesse, parce que là où il y a des jeunes, il y a de l’espérance. Et cela doit interpeller le vieux continent. 

Éminence, en votre qualité de président du Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar, SCEAM, quel est votre regard sur la participation des jeunes africains aux JMJ 2023? 

Deux sentiments se dégagent. Le premier, c’est un sentiment de gratitude envers les jeunes africains qui étaient présents à Lisbonne, rendant visible le visage de l’Eglise d’Afrique. Grâce à eux, quelques drapeaux africains ont pu flotter dans le ciel de Lisbonne. 

Le second sentiment, est celui de regret. Je suis triste parce que l’Afrique n’a pas été suffisamment représentée et cela est dû aux difficultés liées aux problèmes de visas par les Ambassades. Les Ambassades n’ont pas voulu délivrer des visas aux jeunes africains sous prétexte qu’ils n’y retourneront plus. J’estime que cette situation nous interpelle, nous africains. Dans leurs relations avec les pays occidentaux, le pays africains sont invités à relever le défi de demandes des visas dans les chancelleries ou ambassades, afin qu’un traitement digne soit réservé aux jeunes africains. En tant qu’africain et pasteur je suis véritablement attristé.

Est-ce un cri de cÅ“ur ? 

Je souhaiterais que cette question soit prise au sérieux, aussi bien dans nos rapports avec les pays occidentaux qu'à notre niveau, à l’interne. 

Malheureusement pour une question d’immigration clandestine le continent n’a pas été suffisamment représentée. Les prêtres, religieux, religieuses et d’autres accompagnateurs ont plus bénéficié de visas que les jeunes. C’est tout de même paradoxal. La plupart d’Africains que nous avons vus aux JMJ sont, soit des adultes de plus de 30 ans, ou des jeunes africains vivant ici, en Europe. La «vraie» jeunesse africaine a été exclue des JMJ.

Vu que les JMJ sont un évènement organisé par l’Église on se demande si le Saint-Siège est informé de cette situation des difficultés de visas qu’ont rencontrées les jeunes…

Le Saint Siège est bien informé. Toutefois il y’a bien de réalités qui ne dépendent pas du Saint-Siège ni du Pape lui-même.

Comme vous le savez, cette année, le pape a fait une visite apostolique au Congo. Il a eu le temps de rencontrer la Jeunesse dynamique du Congo à Kinshasa. Naturellement. La suite, c'était le rendez-vous de Lisbonne pour les JMJ 2023. Voir que ces jeunes sont exclus. Je suis sûr que le pape vit ça avec beaucoup de peine.

Comment voyez-vous la jeunesse catholique en Afrique aujourd'hui ?

Le futur de l’Église, comme on le dit très souvent, c’est en Afrique, c’est en Asie, c’est en Amérique latine. La jeunesse catholique africaine est dynamique. Au-delà des difficultés d'ordre socio-économique, politique, que traversent l'Afrique, la jeunesse catholique reste une force pour l’Église. Moi, je crois en cette jeunesse. Elle est l’espérance de l’Eglise. Elle le sera davantage pour le continent si elle est bien encadrée. C’est pourquoi, je nous exhorte tous: évêques, prêtres, consacrés, formateurs, accompagnateurs ou encore laïcs, à prendre en main cette jeunesse en continuant à leur indiquer le chemin qui conduit à la vie avec le Christ. 

Selon vous quelles sont aujourd’hui les actions qui pourraient permettre à ces jeunes d’être un futur sûr et solide pour l'Église et pour leurs pays?

C'est d'abord la formation. Nous devons former notre jeunesse à tous les niveaux.  Une formation académique, mais aussi une formation humaine intégrale. Nous ne pourrons pas du tout assurer un avenir heureux à notre jeunesse si nous ne commençons pas à la former.

Éminence, revenons aux JMJ, la prochaine édition, la 38ème se tiendra en Corée du Sud. Quelles sont vos impressions sur le choix du lieu? 

Je suis très heureux que l'Asie ait été choisie pour abriter les prochaines JMJ. Naturellement, on pourrait s’interroger à quand le tour de l’Afrique? Retenons que toute chose s’accomplit en son temps. Et ce temps viendra, et je l'espère. Toutefois soyons réalistes. Il y a un minimum de conditions que nous devons réunir pour espérer avoir l’organisation des JMJ en Afrique, notamment la question de sécurité. Faire venir autant de jeunes, il faut être sûr qu'ils passeront une semaine en sécurité. Deuxièmement, ce sont les infrastructures. Mais cela dit, nous serons heureux d'aller en Asie pour vivre avec nos frères et sÅ“urs une autre expérience des JMJ en 2027 en attendant notre tour.

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08 août 2023, 19:44