En Afrique, le synode est en marche
Christian Kombe, SJ – Cité du Vatican
Organisée par le Symposium des conférences épiscopales d'Afrique et de Madagascar (SCEAM) dans la continuité des deux sessions de travail qui se sont tenues à Accra, au Ghana, et à Nairobi, au Kenya, l'assemblée continentale synodale d’Addis-Abeba a réuni 206 participants de toutes les parties du continent africain, de Madagascar et des îles «pour marcher, prier et célébrer ensemble sous la direction de l'Esprit Saint», note le communiqué final, publié dimanche 5 mars. Neuf cardinaux, 29 évêques, 41 prêtres et un grand nombre de femmes et d’hommes laïcs, de personnes consacrées, et quelques représentants des autres confessions chrétiennes et religieuses, ont séjourné dans la capitale éthiopienne pour identifier les appels du voyage synodal en Afrique. Parmi les invités, une délégation de Rome, conduite par les cardinaux Mario Grech et Jean-Claude Hollerich. L’assemblée synodale continentale a notamment permis au SCEAM de finaliser «la contribution de l'Église en Afrique au Secrétariat général du synode à Rome en vue de la rédaction d'un document de travail».
L'Église synodale d'Afrique
«L'Assemblée synodale continentale a confirmé la manière de faire de l'Église en Afrique», souligne le communiqué final. Les participants ont vécu la synodalité, non comme «un lointain désir, un faible espoir ou un objectif futur lointain», mais concrètement, «en se rencontrant, en dialoguant et en ˛ő’écoutant les uns les autres, et tous ensemble à l'écoute de l'Esprit Saint». Pour les délégués des Églises locales d’Afrique réunis à Addis Abeba, «nous sommes l'Église en synode: la Famille de Dieu est notre identité en Afrique». La synodalité apparaît ainsi comme une caractéristique fondamentale de l’Église famille de Dieu.
«La famille synodale africaine , explique le communiqué final, est une Église qui s'élargit, et inclut toutes nos différences, nos diversités, nos tensions et nos forces». Elle «accueille les autres et fait de la place à leur diversité». Aussi, elle «se vide, mais sans perdre les bases et les fondements de notre foi» et c’est «une Église qui peut bouger».
L’Afrique est un continent synodal
Une grande découverte faite par les participants à l’Assemblée continentale du synode, c’est la nature et la vocation synodale du continent africain dans la riche diversité de ses cultures et traditions.
En s'enracinant dans «les principes anthropologiques et les valeurs culturelles africaines que sont l'esprit communautaire, le sens de la famille, le travail d'équipe, la solidarité, l'inclusion, l'hospitalité et la convivialité», l'Église famille de Dieu peut être «véritablement synodale en Afrique et dans le monde».
L’Église comme famille synodale de Dieu est une communauté où chaque membre se sent chez lui, «où toutes les vocations sont valorisées»; c’est une Église qui écoute sans juger, «surtout ceux qui se sentent exilés, négligés et exclus de l'Église». Parvenir à une telle Église exige «une conversion et une réforme authentiques», reconnaissent les participants à l’Assemblée synodale. Pour ce faire, l’Église doit surmonter les barrières qui ˛ő’opposent au développement d’une authentique synodalité: «les structures hiérarchiques rigides, les tendances autocratiques malsaines, le cléricalisme nuisible et l'individualisme isolant qui sapent et affaiblissent les relations entre évêques, prêtres et laïcs».
Une Église synodale de conversion et de réforme
C’est donc un appel à la conversion et à une réforme profonde qui a émergé de l’Assemblée synodale continentale. Face à ces obstacles qui empêchent le rayonnement de l’esprit synodal apparaît la nécessité «de former la Famille synodale de Dieu à la pratique d'un leadership intégral et vivifiant, relationnel et collaboratif, capable de générer la solidarité et la coresponsabilité». Pour y parvenir, plusieurs pistes ont été retenus par les délégués à l’Assemblée synodale. Il ˛ő’agit tout d’abord de «créer des espaces et élargir la tente pour l'exercice possible de diverses formes de ministère laïc». Un autre moyen efficace est la promotion d’une spiritualité qui favorise la «la pratique de la synodalité», en permettant à l'Église synodale «de grandir en intériorité et en conscience, dans la rencontre et l'écoute de l'Esprit Saint». Par ailleurs, dans cet apprentissage de la synodalité, l’Église doit rester en dialogue, toujours prête à marcher avec les autres, à apprendre d’eux, en considérant les différences culturelles «comme des éléments qui nous aident à grandir». Les participants ont donc souligné l’importance «de l'interculturalité, de l'Ĺ“cuménisme et de la rencontre interconfessionnelle», ainsi que de «l'écoute de la spiritualité et de la sagesse des peuples autochtones et des cultures locales».
Une famille synodale de Dieu en mission
Les travaux de l’assemblée synodale africaine ont également pris en compte les réalités sociales et politiques des peuples du continent, marquées par tant de souffrance et de douleur. «Les blessures des Africains sont aussi les blessures de la famille synodale de Dieu», lit-on dans le communiqué final.
Les délégués des Églises locales d’Afrique ont notamment porté durant ces jours de dialogue, de prière et de réflexion, «la voix des jeunes». C’est grâce à leur énergie, leur passion et leur créativité que l'Église en Afrique est dynamique. Ils ont reconnu leur contribution comme «un don pour l'édification d'une Église véritablement synodale en Afrique».
L’assemblée a également affirmé l’importance du rôle des femmes, «qui ont participé activement au processus d'écoute, de dialogue et de discernement» de l’étape continentale, depuis les deux premières sessions. «Nous avons appris d'elles comment être une Église synodale». L’expérience de ce parcours synodal au niveau continental a montré qu’ «il est impossible qu'une véritable synodalité se produise dans l'Église si les femmes ne sont pas considérées comme des partenaires égaux».
Ainsi, souligne le communiqué final, la synodalité est pour les femmes d'Afrique et du monde entier, «une occasion de "participation pleine et égale" à la vie de l'Église».
Un voyage personnel, communautaire et institutionnel
Le communiqué final de l’assemblée continentale du synode se conclut par une invitation à la joie adressée à tous les membres de l’Église en Afrique. Cette joie de marcher ensemble éprouvée à Addis-Abeba, les délégués veulent la communiquer à l’ensemble de la famille synodale de Dieu. «Notre voyage est un voyage de conversion, de réforme et de croissance aux niveaux personnel, communautaire et institutionnel de l'Église». Aussi appellent-ils le clergé, les religieux, les laïcs, les femmes et les enfants d'Afrique à «se réjouir», à ne pas se laisser entraver par les mauvaises herbes, à laisser plutôt l'Esprit Saint les «conduire en avant pour continuer à semer de nouvelles graines et récolter des fruits abondants de la synodalité».
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