Cardinal Lopez Romero: l’Église du Maroc, laboratoire en ²Ñé»å¾±³Ù±ð°ù°ù²¹²Ôé±ð
Entretien réalisé par Delphine Allaire - Cité du Vatican
Les chrétiens constituent environ 1% au Maroc, et sont majoritairement étrangers. La Constitution du royaume garantit le libre exercice des cultes, mais le défi de la fraternité demeure. Le Maroc sera représenté à la double rencontre de Florence sur la Méditerranée par l’intermédiaire de l’archevêque de Rabat, le cardinal espagnol Cristobal Lopez Romero -également président de la Cerna, la conférence épiscopale d’Afrique du Nord- et par le maire de Fès, Abdeslam El Bakkali.
Forte de son expérience du dialogue interreligieux, l’Église marocaine compte faire valoir en Méditerranée son expérience de «laboratoire» des cultures et religions différentes. Entretien avec le cardinal Cristobal Lopez Romero, archevêque de Rabat, déjà présent à la rencontre de Bari il y a deux ans.
Qu’attendez-vous de ce sommet qui rassemblera dans la suite de Bari une soixantaine d’évêques et maires de la Méditerranée?
Un approfondissement de la rencontre de Bari, une connaissance mutuelle et un dénominateur commun. Cela a été une découverte pour moi de savoir qu’il y a des communautés chrétiennes en Croatie, en Serbie, en Albanie, à Djibouti. Je pensais que la Méditerranée ne concernait que le nord de l’Afrique et le sud de l’Europe, le triptyque France-Espagne-Italie. Or, nous ne devons oublier ni le Moyen-Orient, ni les Balkans. La rencontre s’intitule "Méditerranée, frontière de paix". J’aurais préféré "Méditerranée, paix sans frontière!" Ainsi ce que l’Europe a réussi à faire presque totalement, pourquoi ne pas l’essayer, en se laissant du temps et de la patience, dans le bassin méditerranéen.
Quels sont les défis pour la paix et fraternité que rencontre la petite Église marocaine?
Nous sommes une Église très catholique car les chrétiens du Maroc proviennent de plus de cent nationalités différentes; pas seulement méditerranéennes, mais aussi d’Afrique subsaharienne. Créer la communion à partir des différences, voilà notre premier défi au Maroc et dans la Méditerranée. Créer la communion entre chrétiens d’Irak et d’Espagne, chrétiens d’Italie et d’Algérie, entre Marocains et Croates, tous de cultures différentes. À partir de là, il s'agit être témoins de cette possibilité de vivre en communion, de proposer l’exemple d’une fraternité créée à partir de la diversité.
Comment l’Église marocaine peut-elle apporter sa pierre à l’édifice de paix en Méditerranée?
Nous sommes un laboratoire d’expérimentation de cette communion à partir de la diversité: entre chrétiens et musulmans, car nous vivons et travaillons tout le temps ensemble. L’Église du Maroc représente aussi un pont entre l’Europe et l’Afrique subsaharienne, car nous nous rencontrons en tant que membres de la même communauté paroissiale. Nous pouvons donc dire à tous qu’il est possible de vivre en communion.
En tant que président des évêques d’Afrique du Nord et trois ans après la venue du Pape au Maroc, comment percevez-vous la démarche du Pape François en Méditerranée?
Cela fait écho à la pensée du Pape sur les périphéries. En évoquant les périphéries, nous ne pensons pas à l’Italie, l’Espagne ou la France, mais au Liban, à la Syrie, la Libye, le Maroc, la Crète, Chypre. Ce qui est prophétique est de réunir à la fois des Églises à la longue histoire du riche monde occidental avec des Églises traditionnelles mais pauvres, en difficulté, en minorité au milieu des musulmans.
Cela nous oblige à partir de notre diversité avec une seule voix, un seul Seigneur, un seul baptême. Il est très facile de conduire des projets lorsque nous nous ressemblons tous. Lorsque nous sommes différents, cela a un mérite extraordinaire. La venue du Pape au Maroc a été prophétique pour toute l’Afrique du Nord. Ce Pape qui n’a pas visité l’Espagne, qui ne s’est jamais officiellement rendu en France, ni chez lui en Argentine, vient au Maroc, va à Malte, Chypre. Cela signifie beaucoup. Je pense aussi à son tout premier voyage à Lampedusa. La Méditerranée marque son pontificat.
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