Un autre Noël sans pèlerins pour Bethléem
Entretien réalisé par Manuella Affejee - Cité du Vatican
Le frère Stéphane Milovitch est le responsable des Ressources humaines et des biens culturels de la Custodie de Terre Sainte.
Quelle est l’atmosphère actuellement en Terre Sainte, à quelques jours de Noël ?
L’atmosphère, en ce moment, est un peu particulière, car il n’y a toujours pas de pèlerins. On avait espéré qu’ils puissent revenir, mais à cause de la crise sanitaire, personne ne peut entrer en Israël. Seuls les résidents le peuvent. Les sanctuaires sont vides de pèlerins, les hôtels aussi. C’est un peu décourageant. Mais il faut dire que l’Église locale, les chrétiens locaux sont bien là. L’année dernière, en raison de la situation, la messe de minuit avait vu une participation peu importante des fidèles. Tandis que cette année, même si les pèlerins ne peuvent pas venir, les chrétiens locaux, eux, sont invités à être présents dans la basilique, lors de l’entrée solennelle du patriarche, ainsi qu’aux différentes messes.
Il faut savoir que, normalement, les chrétiens de Bethléem ne participent pas à la messe de minuit du 24 décembre, pour laisser leur place aux pèlerins du monde entier. Cette année, ce sont eux qui pourront y participer. On espère qu’il n’y aura pas de surprise et qu’ils pourront effectivement venir.
C’est le 2e Noël sans pèlerins pour la Terre Sainte, et l’on sait que de nombreux chrétiens locaux, surtout à Bethléem, vivent des pèlerinages, du tourisme, de l’artisanat. Privés de ces sources de revenus, comment envisagent-ils leur avenir, à court et moyen terme ?
On se demande comment les gens font pour continuer à vivre. L’argent ne rentre pas, depuis de nombreux mois maintenant, dans les familles. Il y a sans doute de l’entraide, de la solidarité ou des économies qui ont été faites. Mais on est bien conscient que cela ne peut pas durer éternellement ! On a eu l’impression, vers le mois d’octobre, que les pèlerins pourraient revenir, et d’ailleurs, ils ont commencé à le faire au début du mois de décembre. On a vu de nouveau des guides et des pèlerins qui passaient dans les sanctuaires et on pensait être vraiment sorti du tunnel. Et voilà que depuis une quinzaine de jours, les frontières sont fermées ; on espère vraiment qu’il s’agit là de la dernière vague, sinon on va commencer à se poser de sérieuses questions sur l’avenir ici…
J’invite les pèlerins qui nous écoutent à revenir dès que la situation sanitaire sera meilleure. Ce sera, d’une part, une manière d’aider économiquement les chrétiens qui vivent ici et d’autre part, le fait de figurer parmi les premiers pèlerins représente une expérience magnifique.
Car avant la crise du Covid, l’affluence était telle dans les Lieux saints que les pèlerins avaient un peu de mal à en profiter ; ceux qui ont pu venir ici entre les vagues ont pu prier dans des sanctuaires vides et plus accueillants. Ils en gardent un souvenir inoubliable.
Malgré l’incertitude et l’inquiétude qui peuvent prévaloir, quel est le message que cette petite ville de Bethléem envoie, cette année encore, à l’Église et, plus largement, à l’humanité ?
Les célébrations ont toujours eu lieu à Bethléem, même lors des Intifadas ou des crises sanitaires. L’absence des pèlerins, paradoxalement, fait qu’ils sont encore plus présents dans notre cĹ“ur et nos prières. Les chrétiens locaux vont également se rapprocher des Lieux saints et prier pour cette Église universelle.
On espère que le Seigneur va pouvoir naître dans le cĹ“ur de chacun. A travers cette communion dans la prière, l’humanité est rassemblée autour du Prince de la Paix, qui vient encore annonce qu’il est vainqueur de tout. Espérons être capables de l’accueillir !
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