Le père François Ponchaud, plus d'un demi-siècle au service du Cambodge
Olivier Bonnel-Cité du Vatican
Le 21 décembre une page de l’histoire de l’Église du Cambodge s’est tournée. Une page de l’histoire du pays « tout court » pourrait-on dire, tant la vie du père François Ponchaud se confond avec les tribulations de la nation cambodgienne. Agé de 82 ans, le prêtre des Missions Étrangères de Paris est revenu en France pour prendre sa retraite dans un des foyers des MEP.
Un retour après 56 années passées au Cambodge pour ce natif de Haute-Savoie, un pays où il avait posé un pied en 1965, un an après son ordination sacerdotale. Ses premières années sont consacrées à l’étude du khmer et de la culture cambodgienne bouddhiste. Entre 1969 et 1975, le missionnaire est affecté auprès de la préfecture apostolique de Kompong Cham, au nord-Est de Phnom Penh, le long du Mékong.
Témoin du génocide
1975 est un tournant. Les Khmers Rouges entrent à Phnom Penh et vont y faire régner la terreur. Le «Kampuchea démocratique» sera responsable de la mort de près de 2 millions de personnes. Un génocide qui va éradiquer le quart de la population cambodgienne. François Ponchaud est l’un des derniers occidentaux à être expulsé du pays, le 8 mai 1975, et reste un témoin privilégié de l’horreur du régime qui se met en place. Il le racontera dans un livre, «Cambodge année zéro», paru en 1977. Un récit qui est un succès planétaire et qui révèlera au monde occidental l’ampleur des crimes des Khmers Rouges. Il a surtout pour objectif de réveiller les consciences. «Je ne pouvais pas rester silencieux sur ce que j’avais vu et ce qu’avaient fait les Khmers Rouges, a raconté le prêtre lors d'une conférence au centre culturel français de Phnom Penh quelques jours avant son départ. «Ce n’était pas par soucis idéologique, mais simplement parce que ce qui était relaté était faux».
Hors des frontières cambodgiennes, le père Ponchaud n’en reste pas moins très actif, Å“uvrant auprès des réfugiés dans les camps de la Thaïlande voisine. Il y prêche l’Évangile, traduit le catéchisme en langue khmère, y baptise des convertis.
C’est en 1993 qu’il revient à Phnom Penh où il fonde le Centre culturel catholique cambodgien (CCCC), afin d’enseigner la langue et la culture khmère aux jeunes missionnaires et volontaires. «Quand je suis arrivé au Cambodge en 1998, trois missionnaires m’attendaient à l’aéroport », raconte Mgr Olivier Schmitthaeusler, vicaire apostolique de Phnom Penh «L’un d’entre eux était le père Ponchaud, et il m’a emmené directement au CCCC. J’ai commencé mes cours de khmer au CCCC avec un enseignant cambodgien, et j’ai appris les termes religieux khmers avec le père Ponchaud».
La Bible traduite en langue khmère
Pendant des années, le missionnaire ne cesse de transposer les textes sacrés à la culture cambodgienne, avec comme première étape fondamentale, la traduction de la Bible en langue khmère, achevée en 1997. Viendront ensuite des livres liturgiques, des catéchismes pour les enfants ou des ouvrages pour le catéchuménat. Parallèlement il sera en charge d’une paroisse, d'aide à la construction d’écoles, de latrines ou de digues pour protéger l’agriculture locale des crues. En 2014, le Royaume lui octroi la nationalité cambodgienne.
«L’objectif principal est d’aider les gens à comprendre clairement ce que Bouddha a enseigné et ce que Jésus disait dans les Évangiles, et à les aider à vivre ensemble et à s’aimer les uns les autres» explique le missionnaire au moment de quitter le pays. «Notre vie a de la valeur, même quand on est pauvre».
Une messe d’adieu a été célébrée le 19 décembre dans l’église Saint-Joseph de Phnom Penh. Avant de quitter l’aéroport de la capitale cambodgienne, deux jours plus tard, le missionnaire a promis de revenir visiter sa terre d’accueil et il a formulé le vÅ“u d’y être enterré.
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