Covid-19: malgré le confinement, le ±Êé°ù´Ç³Ü s’englue dans la crise
Entretien réalisé par Adélaïde Patrignani – Cité du Vatican
Comme bon nombre des pays d’Amérique du Sud, le Pérou se trouve en ce moment dans «l’œil du cyclone» avec la Covid-19: plus de 4 600 décès pour 33 millions d’habitants, et plus de 170 000 personnes contaminées, avec une courbe des contagions qui ne cesse de suivre une pente ascendante depuis plusieurs semaines.
Une progression de la faim
Le système de santé, déjà fragile avant la crise, est désormais saturé, et l’économie du pays, paralysée. Un paradoxe apparent, si l’on regarde les moyens déployés par le gouvernement de Martin Vizcarra pour contenir l’épidémie: le confinement national a été décrété mi-mars, et prolongé jusqu’au 30 juin, le couvre-feu est en vigueur chaque fin de semaine, les frontières restent fermées, et une enveloppe de 26 milliards de dollars a été débloquée, soit l'équivalent de 12 % du PIB national, cette somme étant presque exclusivement destinée aux plus démunis et aux petites entreprises.
Mais l’économie informelle représentant 70% des activités au Pérou, beaucoup sont poussés à braver l’ordre de confinement afin de nourrir leur famille. Les prémices d’une crise alimentaire sont déjà visibles, alors que la crise sanitaire s’aggrave.
L'Église sur le terrain
Prêtre Fidei Donum originaire du diocèse d’Amiens, le père Hubert Boulangé est en mission au Pérou depuis 26 ans. Il a désormais la charge de vicaire général de la prélature de Chuquibamba, au sud-ouest du pays, et se trouve témoin de l’expansion dramatique du coronavirus et de ses conséquences. «Les hôpitaux sont complètement délabrés et débordés», explique-t-il. Toutefois, «on ne peut pas ne pas reconnaître que le gouvernement a fait un effort extraordinaire», «le Pérou est le pays qui a sorti le plus d’argent pour aider les plus pauvres». Mais cette générosité porte peu de fruits, constate le prêtre, en raison de plusieurs obstacles, notamment la désorganisation des municipalités et une corruption importante.
Le père Boulangé évoque aussi l’action de l’Église, laquelle intervient principalement avec la Caritas, qui se montre active, mais ne dispose que de «peu de subsides». Au niveau des paroisses, les églises restent fermées. La plupart des prêtres se déplacent porte-à-porte pour porter quelques vivres aux habitants, mais les rassemblements étant interdits, il est difficile de rejoindre beaucoup de personnes.
Le prêtre s’inquiète également de la situation en Amazonie, où «c’est l’hécatombe», en raison de la prolifération du virus et de la rapidité de sa transmission, dans des zones isolées.
Les Péruviens sont pour l’heure confinés jusqu’au 30 juin. Sans oublier les immenses défis que posent une misère croissante, le père Boulangé sait aussi tirer des forces de cette épreuve: «je trouve intéressant d’avoir une expérience cloîtrée à l’intérieur d’une vie missionnaire active». «Quand on a plus de 40 ans d’ordination, ça ne fait pas mal d’avoir un temps de contemplation de l’œuvre de Dieu», confie ce prêtre au parcours riche.
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