Abus: la Compagnie de Jésus au Chili s’excuse et indemnise les victimes d’un prêtre
La procédure judiciaire avait débuté fin janvier dernier, suite à la dénonciation publique d’une des victimes du prêtre jésuite. Le 17 janvier, les jésuites chiliens avaient en effet indiqué avoir reçu des accusations d’abus sexuels commis par le Père Renato Poblete, aumônier emblématique du “Lieu du Christ”, une fondation de charité créée en 1944. Un choc concernant ce religieux qui s’était toujours distingué par l’aide apportée tout au long de sa vie aux plus défavorisés, avant son décès en 2010.
L’enquête s’est donc conclue le 26 juillet dernier, indique la Compagnie de Jésus au Chili dans son . Une déclaration publiée suite à la conférence de presse menée le même jour par le supérieur provincial des Jésuites du Chili, le père Cristián del Campo.
22 témoignages jugés crédibles
Cette enquête a été menée indépendamment par un criminaliste de l'Université du Chili, Waldo Bown. Plus de 100 personnes ont été interrogées, en plus d'autres procédures complémentaires, telles que l'analyse de documents, la réception de témoignages par e-mail et l'inspection de certains lieux. Au cours du procès, l'enquêteur a reçu le témoignage de 22 femmes victimes d'abus sexuels de la part du prêtre Renato Poblete Barth entre 1960 et 2008. Quatre d’entre elles avaient moins de 18 ans au moment des faits.
«L'enquête a considéré que tous les témoignages étaient plausibles et crédibles», peut-on lire dans la déclaration.
Responsabilités partagées
Des responsabilités individuelles et celle de la Compagnie de Jésus ont été établies. En effet, divers éléments ont pu être rassemblés, montrant «qu'il y avait un nombre significatif de personnes, jésuites et laïcs, qui avaient des informations sur le comportement inadéquat du prêtre Renato Poblete Barth».
Cependant, l'avocat Waldo Bown n'a pas attesté «l'existence d'une dissimulation, telle qu’elle est communément compris dans le système juridique chilien», sans toutefois «ignorer le fait qu'il appartient au ministère public et aux tribunaux d'établir son existence».
D’après le rapport de l’enquêteur, aucun membre de la Compagnie de Jésus n’aurait pris connaissance de mauvais traitements, de viol ou d'avortement d'enfants. Par ailleurs, aucune victime n'a indiqué avoir rapporté ce type de crimes à un jésuite. Cependant, il est estimé que dans certains cas, «il y avait une responsabilité éthique à ne pas avoir informé les supérieurs hiérarchiques ou à ne pas avoir pris davantage soin des victimes potentielles».
La Compagnie de Jésus reconnaît ses manquements
La province chilienne des Jésuites présente ses excuses, écrivant : «en tant que Compagnie de Jésus, non seulement dans ce cas, mais aussi dans d'autres cas d'abus, nous avons échoué à réagir de manière décisive, diligente et efficace aux nouvelles, informations ou signaux inquiétants. Cette inaction a permis de graves abus ou n'a pas empêché le comportement abusif de se poursuivre. Nous nous excusons parce que nous n'avons pas agi avec la promptitude et le sérieux qui s'imposaient, avec un regard posé sur ceux qui souffraient en silence».
«Nous nous excusons auprès des victimes d'abus sexuels dans ce cas et d'autres commis par des Jésuites», poursuit le communiqué. «Les dommages causés ont été énormes et, dans de nombreuses affaires, si importants qu'il est difficile de les mesurer par des mots».
L’indemnisation des victimes
Reconnaissant avoir «honte», les Jésuites du Chili expliquent que ces drames vont à «l'encontre de la raison d'être fondamentale de notre existence, de notre mission, qui est précisément la transmission de la Bonne Nouvelle de Jésus Christ, la libération des opprimés et le soin des plus vulnérables. Nous demandons pardon pour leurs actions et pour nos aveuglements et nos négligences», insistent-ils.
Ils précisent enfin que des «mesures de réparation» ont été proposées, comme «un soutien financier pour les traitements thérapeutiques aux victimes qui en ont fait la demande». «Cette offre de soutien sera réitérée à chacun d'eux», est-il écrit. La province jésuite s’engage aussi «à approfondir les espaces de dialogue afin de définir les mesures réparatrices les plus appropriées» en faveur des victimes du père Poblete et d’autres prêtres de la Compagnie auteurs d'abus.
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