Synode: le r?le des diacres, l'initiation chr¨¦tienne et l'aide aux ?glises pauvres
Alessandro Di Bussolo et Giampaolo Mattei ¨C Cité du Vatican
Le témoignage le plus applaudi dans la salle Paul VI, parmi les tables des participants au synode sur la synodalité, a été celui d'une mère, très préoccupée par le fait que l'on ne parle pas assez de l'initiation chrétienne des plus jeunes, au point de demander de l¡¯aide pour les élever dans la foi chrétienne. Les femmes continuent d'occuper une place importante dans les travaux, et il a également été demandé de les impliquer davantage dans les rôles diplomatiques dans les contextes de guerre. C'est ce qu'a rapporté ce mercredi Paolo Ruffini, préfet du Dicastère pour la communication et président de la Commission pour l'information du synode, lors de la conférence de presse qui s'est tenue dans la salle de presse vaticane. Avec Sheila Pires, secrétaire de cette même commission, il a rendu compte des travaux des cinquième et sixième congrégations générales, qui se sont tenues hier après-midi et ce mercredi matin, avec 343 personnes présentes dans la salle, alors que le Pape François se trouvait sur la Place Saint-Pierre pour l'audience générale.
Le rôle indispensable des laïcs dans l'Église
Les interventions, ont-ils souligné, étaient «toutes centrées sur le thème du discernement ecclésial, c'est-à-dire les sujets et les critères, les différents niveaux de responsabilité, le rôle des ministres ordonnés». Sur ce thème, a rappelé Sheila Pires, il y a eu 35 interventions libres mardi après-midi et 21 mercredi matin. Le rôle des laïcs, leur collaboration avec les évêques et les prêtres, leur implication dans les processus de décision, a été l'un des thèmes qui a le plus émergé dans les différentes interventions publiques. «L'importance d'encourager la collaboration entre les prêtres et les laïcs a été soulignée», a précisé Mme Pires, ainsi que la nécessité d'une plus grande participation des laïcs -hommes et femmes- dans les rôles de leadership. En particulier, il a été reconnu que «la présence des laïcs est indispensable, ils coopèrent pour le bien de l'Église». En outre, il a été proposé de consulter le peuple de Dieu sur l'aptitude des candidats au sacerdoce et à l¡¯épiscopat: «l'évêque décide, mais dans une Église synodale, c'est le peuple de Dieu qui doit se sentir responsable du choix» et connaître «les exigences du profil humain et spirituel que les candidats doivent avoir».
Les femmes et le ministère de l'écoute
Une autre proposition, a poursuivi le secrétaire de la commission de l'information, concerne l'importance d'approfondir la réflexion sur le rôle des laïcs dans la pastorale paroissiale, car de nombreux prêtres n'ont pas la vocation d'être curés, tandis que de nombreux laïcs qui mènent une vie conjugale et familiale sereine peuvent exercer des fonctions dans les communautés. En ce qui concerne les femmes, a expliqué Mme. Pires, il est proposé «d'éviter toute forme de discrimination sexuelle dans l'acolytat, de reconnaître davantage» leur «contribution également dans les processus décisionnels» et «de penser à l'écoute comme un ministère essentiellement féminin, complémentaire de celui du curé, du diacre et du catéchiste». Les femmes savent écouter, «elles écoutent d'une manière différente», a-t-on dit dans l'Assemblée, et «elles pourraient le faire comme un service, totalement différent de la confession». Il a également été proposé «d'impliquer davantage les femmes dans la diplomatie dans un monde divisé et en guerre».
Confier aux jeunes une pastorale numérique
Paolo Ruffini a ensuite rappelé que les participants au synode avaient indiqué «la nécessité de se connecter aux nouvelles générations à travers la pastorale numérique». Il a ensuite donné l'exemple des nombreux jeunes d'Afrique qui «vont à l'Église, ont du talent, de l'énergie et la foi» et qui doivent donc «faire partie du discernement de l'Église». Et l'on a proposé de confier la pastorale des jeunes précisément aux jeunes: en bref, «des jeunes pour les jeunes, et non des adultes pour les jeunes», a-t-on dit, «afin d'être en dialogue avec des pairs enfermés dans des idéologies ¡°new age¡± ou nihilistes». Une intervention a évoqué «la situation dramatique que vivent beaucoup d'enfants dans le monde: des enfants forcés à se marier jeunes pour des raisons familiales, des filles forcées à se prostituer, des mineurs victimes de la traite des êtres humains», a précisé Paolo Ruffini. Il a également été question de «séminaristes issus de familles non chrétiennes ou contraints au sacerdoce pour des raisons d'honneur, de personnes qui doivent assumer leur homosexualité».
La mère: encourager la coresponsabilité des parents
Le Préfet du dicastère pour la communication a souligné que «les paroles du Pape ont été rappelées: le Synode n'est pas destiné à produire des documents, mais à inspirer l'action. Il a donc été répété qu'il ne suffira pas d'écouter les voix chrétiennes et paroissiales, mais aussi les voix courageuses de l'extérieur, afin de créer des espaces sûrs pour que les gens puissent se manifester». Il a ensuite rappelé le témoignage de la mère qui a soulevé une question: «Que dit l'assemblée sur le rôle des parents, des grands-parents, des parrains et marraines chrétiens dans la contribution à la synodalité sur l'écoute et le discernement dès l'enfance? Il faut élever les enfants pour qu'en grandissant ils aillent vers le Christ». Le document final, a-t-elle souhaité, devrait donc «encourager le rôle de coresponsabilité des parents».
Accompagner les victimes d'abus
Il a ensuite été fait référence à «la nécessité d'accompagner les victimes d'abus au sein de l'Église». Il a été souligné que l'Église doit s'approcher des personnes vulnérables et que le pouvoir doit être un service et jamais un cléricalisme. De même, selon le préfet, «il a été demandé d'accorder une plus grande place aux pauvres, y compris dans la formation du clergé». En particulier, «les pauvres sont plus proches du c?ur de Dieu, ils ont l'autorité», a-t-il déclaré, «et nous les considérons comme des objets de ministère et de mission, mais jamais comme des ministres». Dans la salle, a poursuivi Paolo Ruffini, «on a parlé des prêtres, en particulier de leur solitude, due aussi à une surcharge de travail. Dans ce sens, il a été souligné qu'une certaine distance des prêtres par rapport à la synodalité provient du fait que beaucoup d'entre eux ont de lourdes charges, qu¡¯ils gèrent plusieurs communautés et ont un fardeau administratif». Le synode devrait réussir à raviver leur vocation. «Il a donc été proposé de doter chaque paroisse de conseils économiques et éventuellement de structures regroupant plusieurs paroisses pour aider les curés dans leur service».
Pensons à jouer le jeu, pas à nous entraîner
L'invitation au dialogue, entre les Églises et au sein de l'Église, a également été forte. Et, a rapporté Paolo Ruffini, «l'évêque chinois Joseph Yang a pris la parole, apportant ses salutations et louant les bénéfices apportés par l'accord de 2018 entre le Saint-Siège et la Chine». Enfin, un intervenant a suggéré que l'assemblée se concentre davantage sur la réalité, y compris dans la rédaction du document final. En utilisant une métaphore footballistique, a conclu Paolo Ruffini, il a été dit qu'il semble que l'Église, au lieu de jouer le jeu, se concentre sur l'entraînement.
Enfin, le préfet du dicastère pour la Communication a signalé qu'à la fin de la réunion, le cardinal secrétaire général Mario Grech a lu un communiqué du cardinal Víctor Manuel Fernández, préfet du dicastère pour la Doctrine de la foi, précisant que le thème du groupe d'étude n° 5 -sur «Quelques questions théologiques et de droit canonique autour des formes ministérielles spécifiques (RdS 8 et 9)», en particulier la participation des femmes à la vie et au leadership de l'Église- avait été confié à ce dicastère avant la deuxième assemblée du Synode. Par conséquent, le travail doit suivre les procédures du dicastère prévues dans son propre règlement, en vue de la publication d'un document spécial. Après avoir écouté les évêques et les cardinaux impliqués, le synode entre maintenant dans une phase de consultations: les consulteurs ont déjà été entendus, ce qui a permis d'établir la base du document. Ainsi, tous les membres, théologiens et théologiennes du Synode peuvent envoyer des avis et des contributions dans les mois à venir. Le 18 octobre, deux théologiens recevront les différentes propositions sur le sujet, par écrit ou oralement.
Une réunion post-synodale également pour les diacres
Le rôle des diacres permanents dans l'Église et leur participation au Synode, l'initiation chrétienne et l'abandon des communautés par les adolescents, la spiritualité synodale qui conduit à une «purification» des rapports humains dans l'Église et avec la société, mais aussi une demande d'aide de l'Église du Mozambique, tels sont les thèmes abordés par les trois invités de la Salle de presse du Saint-Siège, représentants de trois continents, l'Afrique, l'Amérique et l'Europe. Le diacre Geert De Cubber, témoin du processus synodal, théologien, ancien journaliste, diacre permanent du diocèse de Gand (Belgique) et délégué épiscopal à la catéchèse et à la pastorale des jeunes et de la famille, a été le plus sollicité par les journalistes, après son intervention initiale. Il est le seul membre de l'assemblée des diacres permanents, marié, avec des enfants issu de l'Église latine, bien que, parmi les Églises catholiques orientales, il y ait également un membre de l'Église syriaque et un Melkite, qui sera bientôt ordonné prêtre.
Le diacre Geert De Cubber a répété ce qu'il avait dit dans la salle du Synode: le diacre est un «bâtisseur de ponts» dans la famille («moi, a-t-il confié, j'ai fait un ¡°pré-synode¡± avec ma femme et mes trois enfants, pour pouvoir être ici»), avec d'autres familles, dans la communauté et aussi avec la société extérieure, «et cela peut être vraiment utile dans une société sécularisée» comme la Belgique, que le Pape a visitée fin septembre, après le Luxembourg. La tâche du diacre, a-t-il ajouté, est d'aller «là où l'Église ne va pas, vers ceux qui n'ont pas de voix et qui sont marginalisés par l'Église elle-même et par la société, et de les ramener dans l'Église». Dans une Église où les pratiquants sont souvent fatigués et âgés, et où «si nous ne marchons pas de manière synodale, l'Église ne survivra pas», le diacre belge a cherché à introduire la synodalité parmi les jeunes, en unissant les pastorales des jeunes de tous les diocèses de langue flamande dans cet effort. «Entre-temps, nous avons changé de nom, nous sommes désormais 'Kammino', le 'k' indiquant que nous sommes catholiques, Katholiek dans notre langue». Répondant à la question d'un journaliste, il a admis que les diacres auraient pu être mieux représentés au synode et qu'il savait que les nombreux diacres des États-Unis, n'étaient «pas très heureux que nous soyons si peu nombreux». Il a donc proposé une réunion post-synodale des diacres, comme cela a été fait cette année avec les prêtres de paroisse. «Être diacre, conclut Geert De Cubber, n'est pas du tout pour moi une préparation au sacerdoce, je n'ai pas cette vocation. Notre ministère est exclusivement un ministère de service».
Le Chili et la richesse du diaconat permanent
Interrogé sur le sujet, l'archevêque de Puerto Montt (Chili), Mgr Luis Fernando Ramos Pérez, a souligné que dans son pays, après le Concile Vatican II, de nombreux diacres permanents ont été ordonnés. Aujourd'hui «ils sont plus nombreux que les prêtres et les religieux», et leur contribution «est extraordinaire et appréciée, ils administrent les paroisses avec le curé». Mais ils ne sont pas des «prêtres en miniature». Pour sa part, Mgr Inácio Saure, archevêque de Nampula, président de la Conférence épiscopale du Mozambique, a expliqué qu'il n'y a pas de diacres dans son Église pour le moment, «parce que nous sommes très engagés dans la formation des prêtres». Mais à l'avenir, si l'occasion se présente, ils seront certainement ordonnés. Il faut également préparer les communautés paroissiales qui, «lorsqu'un diacre en vue du sacerdoce arrive, nous demandent immédiatement: 'Pourquoi ne célèbre-t-il pas?».
L'archevêque africain, répondant à une question, a appelé le Synode à faire connaître la situation dramatique de son pays, dévasté par la guerre qui a débuté en 2017 (aujourd'hui suspendue) et qui a fait 5 000 morts et un million de déplacés. Bien que beaucoup d'aide ait été apportée par le passé, «les gens souffrent beaucoup aujourd'hui, et ils sont livrés à eux-mêmes. On peut donc faire plus», dans un échange de dons matériels «entre les Églises qui ont beaucoup et celles qui sont dans la misère». Dans son intervention, Mgr Saure a évoqué l'importance de l'initiation chrétienne comme rencontre personnelle avec le Christ, soulignant que «même dans notre pays, les jeunes qui ont terminé l'initiation s'éloignent de l'Église», et qu'il faut donc mieux s'en occuper. Il a expliqué qu'au cours des six dernières années, dans le cadre de la pastorale des jeunes, il a essayé de le faire «avec les jeunes, pour les jeunes et par les jeunes» et que la canonisation le 20 octobre prochain, du fondateur des Missionnaires de la Consolata, le bienheureux Allamano, qui a dit «d'abord les saints, ensuite les missionnaires», pourrait également être un stimulant.
Purifier les relations dans l'Église et avec la société
Mgr Ramos Pérez a parlé d'une spiritualité synodale qui transformerait les structures de l'Église, indiquant que le Synode avait parlé d'une «spiritualité personnelle qui favoriserait la conversion pastorale individuelle et communautaire». Enfin, il s'agit de parvenir à une «purification» des relations humaines dans l'Église et avec la société, car aujourd'hui, certaines relations font grandir et d'autres «peuvent détruire». Il a conclu en soulignant que ceux qui ont des responsabilités dans l'Église doivent les exercer avec «des critères de synodalité, en prenant des décisions» en consultant la base. Pour cela, «il faut un discernement synodal qui implique aussi les laïcs, hommes et femmes, et pas seulement les ministres ordonnés».
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