Cardinal Parolin: quelle ¨¦±¹²¹²Ô²µ¨¦±ô¾±²õ²¹³Ù¾±´Ç²Ô pour nos soci¨¦t¨¦s?
Il y a 175 ans, le vénérable Emmanuel d¡¯Alzon fondait la famille des Augustins de l¡¯Assomption, lui assignant des «buts apostoliques» à travers l¡¯éducation, la formation du clergé, l¡¯organisation des pèlerinages de groupes, ou encore la création de journaux et périodiques qui puissent participer à la formation d¡¯une opinion publique catholique.
Le cardinal Parolin distingue «un lien», «un fil rouge» entre l¡¯époque de cette fondation et «notre vie quotidienne contemporaine», à savoir «la fin du régime de chrétienté qui a caractérisé de diverses façons l¡¯histoire à partir du IVe siècle». Le père d¡¯Alzon, né immédiatement après la Révolution française, a vécu dans un monde en mutation, note le secrétaire d¡¯État qui souligne que cette mutation n¡¯est pas terminée. «Nous aussi nous faisons partie d¡¯un monde où le régime de chrétienté de notre enfance, de notre adolescence et de notre jeunesse (¡) a fait place à une véritable transformation anthropologique dont nous sommes bien loin de voir les ultimes résultats».
Un nouveau commencement
Face à une telle situation, il existe deux types de comportements : «soupirer après le "beau passé" qui n¡¯est plus là ; ou bien se mettre en route pour semer les processus d¡¯un nouveau commencement». La présence des Augustins de l¡¯Assomption témoigne aujourd¡¯hui encore du choix du père d¡¯Alzon, qui ne s¡¯est pas complu dans un regret du passé, mais s¡¯est évertué à se mettre en mouvement, «pour que la fin puisse devenir un nouveau commencement». C¡¯est précisément ce discernement, que prône à son tour le Pape François, qui permet aujourd¡¯hui aux assomptionnistes de se retrouver «au c?ur même de l¡¯Église non pas comme un "groupe de professionnels", mais comme une "famille de frères" ; non pas comme une ONG ¨C dirait encore le Pape François ¨C mais comme une véritable communauté de foi, qui dans la foi attend et prépare patiemment son retour glorieux».
«L¡¯histoire de l¡¯Église et l¡¯histoire de votre famille religieuse est une histoire de c?urs : d¡¯êtres humains concrets qui, portés par la beauté de la Parole à la beauté de la liberté qui sait dire "Me voici", deviennent capables de construire une synodalité. Le c?ur de l¡¯Église et les c?urs des croyants, en effet, accèdent à leur maturité mutuelle lorsqu¡¯ils sont en mesure de s¡¯engager ensemble avec les autres et pour les autres. D¡¯autre part, la forme première et fondamentale de la justice évangélique est de faire de la place à l¡¯autre à la suite de celui qui nous a fait de la place en lui, en devenant l¡¯un de nous», a encore souligné le cardinal Parolin.
Changement de mentalité pastorale
C¡¯est justement fort de cette «justice évangélique» que les croyants sont appelés à habiter le «provisoire» inhérent au changement d¡¯époque, «avec audace et sans angoisse», «sans renoncer d¡¯avoir clairs à l¡¯esprit les points-clés qui nous empêchent d¡¯être des "girouettes au vent", qui changent de direction sans savoir pourquoi, se soumettant au vent du moment, alors que tout autre est le Souffle de l¡¯Esprit».
La division d¡¯un monde entre deux aires distinctes, l¡¯une chrétienne et l¡¯autre à évangéliser, est caduque. Le Pape François, cité par le cardinal Parolin, l¡¯exprimait clairement dans son dernier discours de v?ux à la curie (21 décembre 2019): «les populations qui n¡¯ont pas encore reçu l¡¯annonce de l¡¯Evangile ne vivent plus du tout seulement sur les Continents non occidentaux, mais se trouvent partout, surtout dans les énormes concentrations urbaines qui demandent, en elles-mêmes, une pastorale spécifique. Dans les grandes villes, nous avons besoin d¡¯autres ¡°cartes¡±, d¡¯autres paradigmes, qui nous aident à repositionner nos manières de penser et nos attitudes : frères et s?urs, nous ne sommes plus en chrétienté, nous ne le sommes plus ! Nous ne sommes plus les seuls aujourd¡¯hui à produire la culture, ni les premiers, ni les plus écoutés. Par conséquent, nous avons besoin d¡¯un changement de mentalité pastorale, ce qui ne veut pas dire passer à une pastorale relativiste. Nous ne sommes plus dans un régime de chrétienté parce que la foi ¨C spécialement en Europe, mais aussi dans une grande partie de l¡¯Occident ¨C ne constitue plus un présupposé évident du vivre-ensemble ; pire elle est souvent même niée, raillée, marginalisée et ridiculisée [¡]»
Une évangélisation ancrée, libre de tout intérêt
Pour le cardinal italien, le fait de n¡¯être plus «les seuls à produire la culture, ni les premiers, ni les plus écoutés» nous libère des «mécanismes pervers» d¡¯une conception «liquide» du monde. Le chrétien y succombe lorsqu¡¯il cherche à plaire ou à séduire. Or «l¡¯évangélisation n¡¯est pas la séduction du prochain, mais le service du prochain dans la vérité», rappelle le cardinal Parolin.
Ce statut de minorité libère aussi de tout intérêt; l¡¯évangélisateur ne doit pas avoir d¡¯autres intérêts que ceux du Christ, lesquels rendent «humbles, désintéressés».
La marginalisation de Dieu nous permet enfin de méditer «sur la dernière place qu¡¯Il a choisi pour Lui et ses témoins» ; «c¡¯est cela la vraie "réserve de grâce" qui empêche l¡¯idolâtrie et rend actifs dans les domaines complexes du dialogue ?cuménique et du dialogue interreligieux», observe encore le secrétaire d¡¯État. De même, «seul un Dieu marginalisé, nié et ridiculisé est en mesure de nous rendre solidaires avec les pauvres et les exclus de ce monde ; et avec la même "maison commune" qui est notre planète, blessée par des systèmes économiques rapaces et par les organisations criminelles».
Merci d'avoir lu cet article. Si vous souhaitez rester inform¨¦, inscrivez-vous ¨¤ la lettre d¡¯information en cliquant ici