Sommet sur les droits des enfants: ?Tuer les petits, c¡¯est nier l'avenir?
Alexandra Sirgant ¨C Cité du Vatican
Le 25 mai 2024, le Pape accueillait 50 000 enfants du monde entier dans le stade olympique de Rome pour la toute première Journée mondiale des enfants. Huit mois plus tard, le Souverain pontife convoque entre les murs du Palais apostolique plusieurs dirigeants, politiques et économistes, représentants de la société civile et religieux, afin de placer les droits et les rêves des plus jeunes au centre des préoccupations mondiales.
Avant de rencontrer les différentes personnalités, réunies ce lundi matin en table ronde dans la Salle Clémentine, le Souverain pontife a été accueilli par une délégation d¡¯enfants, munie d¡¯une lettre de remerciements et de propositions lui étant destinée. «Nous t¡¯écrivons au nom des enfants de toute la Terre, nous voulons te remercier parce que tu te soucies de nous et de notre avenir, tu nous aimes et tu nous protèges», ont souligné les jeunes, reprenant ainsi le thème de ce sommet inédit: «Aimons et protégeons-les». La rencontre, à laquelle participe la reine Rania Al Abdullah de Jordanie, le prix Nobel de la paix 2014 Satyarthi Kaylash ou encore l¡¯ancien vice-président américain Al Gore, se concentrera sur huit points, allant du droit à l¡¯éducation à celui de vivre loin de tout type de violences.
L'enfance, considérée comme périphérie «dans la culture de l'efficience»
Lors de son discours d¡¯ouverture, le Pape a dressé la liste les dangers qui guettent les enfants aujourd¡¯hui, et autours desquels les intervenants sont appelés à échanger afin d¡¯«ouvrir des nouvelles voix pour les sauver et les protéger». En premier lieu, les fléaux de la guerre et de la pauvreté, de l¡¯injustice et de l¡¯exploitation, qui marquent la vie de millions d¡¯enfants. Cependant, précise le Souverain pontife, «là où, grâce à Dieu, les gens ne souffrent pas de la guerre ou de la faim, il y a néanmoins des périphéries difficiles, où les petits sont souvent victimes de fragilités et de problèmes que nous ne pouvons pas sous-estimer». À commencer par l¡¯anxiété et la dépression qui touchent, «plus que par le passé», les jeunes, et les poussent à emprunter parfois les «voies de l¡¯agressivité ou de l¡¯automutilation». François a déploré que, tout comme la vieillesse, l¡¯enfance soit considérée comme une «périphérie» de l¡¯existence dans «la culture de l¡¯efficience».
Les jeunes peinent à reconnaitre l¡¯espérance en eux-mêmes
«De plus en plus», a poursuivi François, «ceux qui ont la vie devant eux ne parviennent pas à l'envisager avec une attitude confiante et positive». Et l¡¯évêque de Rome de souligner ce paradoxe contemporain: «Ce sont précisément les jeunes, qui sont des signes d'espérance dans la société, qui peinent à reconnaître l'espérance en eux-mêmes». Une réalité inquiétante qui s¡¯explique par les conditions structurelles dans lesquelles évoluent les plus jeunes aujourd¡¯hui: «Lorsque l¡¯avenir est incertain et imperméable aux rêves, lorsque les études n¡¯offrent pas de débouchés et que le manque de travail ou d¡¯emploi suffisamment stable risque d¡¯annihiler les désirs, il est inévitable que le présent soit vécu dans la mélancolie et l¡¯ennui», a souligné François, citant un extrait de la Bulle d¡¯indiction du Jubilé ordinaire,
Résister à l¡¯accoutumance à l¡¯inacceptable
Le Pape argentin a exhorté les participants au sommet à ne jamais s¡¯accoutumer à l¡¯inacceptable: aux enfants qui meurent sous les bombes, «sacrifiés aux idoles du pouvoir, de l'idéologie et des intérêts nationalistes», aux enfants piégés par la violence des bandes criminelles, ou encore aux enfants mourant en mer ou dans le désert «sur les nombreux itinéraires de voyages désespérés d¡¯espérance». «Tuer les petits, c¡¯est nier l¡¯avenir», a-t-il martelé. «L'enfance bafouée est un cri silencieux qui dénonce l'injustice du système économique, la criminalité des guerres, le manque de soins médicaux et de scolarisation». Autant d¡¯injustices que le Pape a étoffées s¡¯appuyant sur plusieurs chiffres: 40 millions d¡¯enfants sont déplacés par les conflits, 100 millions sont sans abris, 160 millions sont victimes de travail forcé, de traite et d¡¯exploitation. En s¡¯habituant à cela, met en garde le Pape, l¡¯humanité risque de perdre «ce qu¡¯il y a de plus noble dans le c?ur de l¡¯homme», à savoir «la miséricorde» et «la pitié».
François s¡¯est également arrêté un instant sur la problématique des enfants «invisibles», vivant sans état civil, dont le nombre est estimé à 150 millions. Ces enfants souvent privés d¡¯accès à la santé et à l¡¯éducation et, en raison de l¡¯absence de leur identité légale, «peuvent facilement être maltraités ou vendus comme esclave» à l¡¯image des enfants Rohingyas, persécutés en Birmanie, ou encore des «indocumentados», les enfants sans papiers à la frontière américaine, «premières victimes de l'exode du désespoir et de l¡¯espérance de milliers de personnes qui remontent du Sud vers les États-Unis».
Les récits de guerre pour comprendre la valeur de la vie
Pour comprendre la valeur inestimable de la vie, François a invité à «regarder avec les yeux de ceux qui ont vécu la guerre» par le passé, mais aussi à écouter «les enfants qui vivent aujourd'hui dans la violence, l'exploitation ou l'injustice». Des témoignages qui servent, selon la Saint-Père, «à renforcer notre "non" à la guerre, à la culture du déchet et du profit, dans laquelle tout s'achète et se vend sans respect ni souci de la vie, en particulier de la vie petite et sans défense». Le Pape a réitéré son opposition à la pratique de l¡¯avortement qui «coupe la source d'espérance pour toute la société».
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