Asia Bibi, une martyre d¡¯aujourd¡¯hui
Salvatore Cernuzio - Cité du Vatican
La sainteté est «familiale», selon François, dans le sens où «c'est un chemin communautaire à faire à pas de deux», comme l'enseignent les parents de Sainte Thérèse ou la famille Ulma, massacrée par les nazis et béatifiée en septembre dernier en Pologne. La sainteté «unit» également à Dieu et à ses frères et s?urs, ce qui conduit, dit le Pape à une «étreinte d'unité et de paix» dont le monde a besoin aujourd'hui. Surtout, la sainteté est «martyre», comme le montre la longue histoire des témoins, des martyrs des premiers siècles aux coptes assassinés par Daesh en 2015 en Libye, tués pour leur foi ou persécutés comme la pakistanaise Asia Bibi.
Asia Bibi, un martyre continu
Et le Pape de s¡¯arrêter sur la vie de cette paysanne catholique pakistanaise qui fut la protagoniste d'une odyssée judiciaire de neuf ans, entre condamnations à mort pour blasphème et emprisonnement, jusqu'à son acquittement final. «Un cas de vie chrétienne vécue dans un martyre continu», dit François. «Pendant tant d'années, elle a été en prison, et sa fille lui apportait l'Eucharistie, jusqu'au moment où les juges l'ont déclarée innocente. Presque neuf ans de témoignage chrétien! C'est une femme qui continue à vivre, et il y en a beaucoup, beaucoup comme elle, qui témoignent de la foi et de la charité», a lancé François.
La sainteté, un appel adressé à l¡¯ensemble des baptisés
Devant les participants à cette conférence de trois jours sur "La dimension communautaire de la sainteté", organisée par le dicastère pour la Cause des saints à l'Institut patristique Augustinanum, le Pape a rappelé trois «aspects» de la sainteté, à commencer par la «dimension communautaire» chère au concile Vatican II que Jean-Paul II avait traduite en ce qu'il a appelé la «vocation universelle à la sainteté». C'est-à-dire l'appel adressé à tous à être saints. Cette perspective s'est développée au fil du temps, comme en témoigne «le nombre de béatifications et de canonisations d'hommes et de femmes appartenant à différents états de vie: époux, célibataires, prêtres, consacrés et laïcs de tous âges, de toutes familles - je pense aux martyrs de Pologne -, de toutes origines et de toutes cultures». Tous les frères et s?urs appartenant au «saint peuple fidèle de Dieu» ou, dit le Souverain pontife, aux saints dits «d'à côté», «membres de nos communautés» qui «ont vécu une grande charité dans les petites choses de la vie quotidienne, malgré leurs limites et leurs fautes, en suivant Jésus jusqu'au bout».
Un événement communautaire
Ils sont l'exemple d'une «sainteté qui unit», dans le sens où, explique François, «il ne s'agit pas seulement d'un événement personnel, mais aussi d'un événement communautaire». Car «lorsque Dieu appelle l'individu, c'est toujours pour le bien de tous». À cet égard, le Pape cite Gaudium et spes, qui affirme que «la sainteté unit et, à travers la charité des saints, nous pouvons connaître le mystère de Dieu qui, uni à tout homme, embrasse dans sa miséricorde l'humanité tout entière, pour que tous soient un». Dans un élan, le Pape juge que le monde d¡¯aujourd¡¯hui a besoin de trouver l'unité et la paix dans une telle étreinte.
Les écrits de sainte Thérèse
Dans le même esprit, François rappelle les paroles de sainte Thérèse de l'Enfant Jésus, à qui il a dédié, à l'occasion du 150e anniversaire de sa naissance, l'exhortation apostolique . Dans ses écrits, Thérèse «contemple, avec une image biblique évocatrice, l'humanité entière comme le "jardin de Jésus", dont l'amour embrasse toutes les fleurs d'une manière à la fois inclusive et exclusive, et demande à être enflammée jusqu'à l'incandescence par le feu de cet amour, afin d'y conduire à son tour tous les frères et s?urs». C'est l'évangélisation «par attraction». C'est le témoignage, poursuit François, il est le fruit de la plus haute expérience mystique de l'amour personnel et de la «mystique du nous».
Les couples saints
Ce «nous» prend la dimension d'une sainteté «familiale». L'Église compte de nombreux exemples de «couples mariés saints, dans lesquels chaque conjoint a été un instrument de sanctification de l'autre». Le Pape François en cite quelques-uns: Louis et Zélie Martin; les bienheureux Luigi et Maria Beltrame Quattrocchi; les vénérables Tancredi et Giulia di Barolo et Sergio et Domenica Bernardini. Sans oublier Jozef et Wiktoria Ulma et leurs sept enfants, barbarement assassinés par les nazis pour avoir caché des Juifs dans leur maison et qui ont été béatifiés en septembre dernier en Pologne. Ils sont «un exemple lumineux», a souligné le Pape, et sont «tous des martyrs».
Le temps des martyrs
Car la sainteté est aussi «martyriale». «C'est un modèle fort, dont nous avons de nombreux exemples dans l'histoire de l'Église, depuis les communautés des origines jusqu'aux temps modernes, à travers les siècles et dans les différentes parties du monde», note l'évêque de Rome. Il n'y a pas d'époque sans martyrs, et notre période ne fait pas exception. «Souvent, dit François, il s'agit de communautés entières qui ont vécu héroïquement l'Évangile ou qui ont offert à Dieu la vie de tous leurs membres». Et le discours s'élargit encore si l'on considère la «dimension ?cuménique» du martyre, avec tous les membres des différentes confessions chrétiennes. Le Pape mentionne les 21 martyrs coptes assassinés par des djihadistes sur une plage libyenne en 2015. Lors de sa rencontre en mai avec le patriarche Tawadros II, le Pape a annoncé qu'ils avaient été introduits dans le martyrologe romain. Des martyrs, donc, aussi pour l'Église catholique.
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