Jean Guitton, premier la?c au Concile Vatican II
Olivier Bonnel - Cité du Vatican
Jean Guitton naît à Saint-Etienne, le 18 août 1901, dans une famille de la bourgeoisie catholique. Ses brillantes études le mèneront jusqu¡¯à l¡¯École Normale Supérieure ; il est ensuite reçu deuxième à l¡¯agrégation de philosophie en 1923. Sa thèse porte sur Le Temps et l'éternité chez Plotin et saint Augustin.
Au fil de ses années d¡¯enseignant et d¡¯intellectuel, sa figure va s¡¯imposer parmi les voix catholiques les plus importantes du XXe siècle. Mais sa popularité fut aussi grande sur les rives de la Seine que celles du Tibre. L'histoire intellectuelle de Guitton est en effet autant parisienne que romaine. En effet, il se lia d¡¯amitié avec Giovani Battista Montini, futur Pape Paul VI, au point d¡¯en devenir l¡¯un de ses confidents. Une rencontre qui remonte à 1950, bien avant l'élection de Montini au siège pétrinien. Alors Subtstitut pour les affaires générales au Vatican, le futur Pape souhaitait féliciter le philosophe pour la publication de son ouvrage La Vierge Marie, en 1949.
Un laïc au Concile
Les années soixante sont celles d'une révolution dans l'Église avec la convocation du Concile Vatican II. Jean Guitton va y apporter sa pierre de manière décisive. Le Pape Jean XXIII avait décidé de la participation de laïcs aux sessions du Concile. En septembre 1962, la Secrétairerie d'État établit une liste de douze noms, bientôt complétée par trois autres personnalités, parmi lesquelles figure Guitton. Le Français sera le seul laïc catholique présent à la première session. Quelques mois plus tard, Guitton publie L'Église et les laïcs, une réflexion essentielle où il revient notamment sur les intuitions du cardinal Newman prophétisant la consultation des laïcs en matière de foi.
«Le laïc est paradoxalement un être inconnu, alors qu'il est l'immense majorité du genre humain» déclarait-il dans une émission télévisée en 1963. La nouveauté du Concile, explique t-il, est que la vision du laïc, qualifié jusqu'ici comme un "non clerc", un être "défini négativement" va être considérée de manière positive. Le laïc est le peuple de Dieu tout entier, qui chemine depuis Abraham, "cette grande caravane humaine qui va jusqu'à l'éternité" explique encore le philosophe.
Au terme de la troisième session, à la demande des auditeurs, Jean Guitton rédigera une synthèse sur le rôle des laïcs dans le monde. «Dans toutes les formes de sa vie familiale, professionnelle, civique et culturelle, le laïc s'efforce de traduire, d'adapter, d'insérer la grâce multiforme de Dieu dans des structures anciennes et nouvelles, toujours en voie de réforme et de progrès» écrit-il.
Un dialogue ininterrompu avec Rome
Le compagnonnage intellectuel de Guitton avec le Saint-Siège sera toujours très fort jusqu'à sa disparition en 1999, à l'âge de 97 ans. En témoignent les 350 articles signés de sa main ou qui lui sont consacrés dans les pages de l'Osservatore Romano, et qui couvrent une trentaine d'années. L'intellectuel français avait fait le voeu de venir visiter Paul VI chaque 8 septembre, date de leur première rencontre. Une parole qu'il a tenue vingt-sept années durant, sans compter les autres rencontres.
Guitton sera aussi un peintre, soucieux de traduire l'Absolu dans ses ?uvres picturales. Il a notamment réalisé un Chemin de Croix que l'on peut admirer dans l'Église Saint-Louis des Invalides à Paris. C'est dans cette église que ses funérailles seront célébrées le 25 mars 1999 par le cardinal Jean-Marie Lustiger. L'archevêque de Paris évoque cette ?uvre dans son homélie: «Jean Guitton a peint une quinzième et dernière icône, non de lui-même, mais parce que cela lui a été demandé. Et Jean Guitton écrit : « Je vais à mon Père. » C¡¯est la foi de Jean Guitton. C¡¯est la nôtre. C¡¯est notre prière pour lui».
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