En ?gypte, sursaut de contestation contre le pr¨¦sident Al-Sissi
Entretien réalisé par Delphine Allaire ¨C Cité du Vatican
La mythique place Tahrir au c?ur du Caire incarne à nouveau le symbole de la révolte. Sept ans après le printemps arabe qui a conduit en Égypte au départ d¡¯Hosni Moubarak, la crainte d¡¯une nouvelle révolution menace le régime du maréchal Al-Sissi, fort d¡¯une image de stabilité entretenue comme telle depuis l¡¯été 2013.
Le président Al-Sissi s'est montré, pour sa part, confiant en marge des manifestations de vendredi: «Il n'y a pas de raisons de s'inquiéter. L'Égypte est un pays fort grâce aux Égyptiens», a-t-il déclaré, souriant, devant un petit groupe journalistes locaux peu après son retour des États-Unis où il a participé à l'Assemblée générale des Nations unies. «L'affaire ne mérite pas tout ça! Il y a une tentative pour créer une image de la situation qui n'est absolument pas réelle», a-t-il ajouté.
Pourtant, à Alexandrie, Al-Mahalla, Damiette dans le delta du Nil, ou encore à Suez, des milliers d¡¯Égyptiens sont descendus dans la rue. Fait rare, car les manifestations antigouvernementales sont interdites depuis 2013 dans le pays, en vertu d¡¯une loi adoptée après le coup d¡¯État militaire du général Sissi contre le président islamiste Mohamed Morsi.
À l¡¯origine de cette révolte populaire, une série de vidéos publiées sur les réseaux sociaux par un entrepreneur égyptien du bâtiment exilé en Espagne, Mohammed Aly. Accusant le président Abdel Fattah Al-Sissi de corruption et de mauvaise gestion d¡¯argent public pour construire luxueux hôtels et palais, elles ont embrasé l¡¯opinion publique. Les manifestants réclament désormais la démission du président.
Par ailleurs, le rôle grandissant pris par les militaires dans divers secteurs de l¡¯économie depuis l¡¯arrivée au pouvoir d¡¯Al-Sissi, et la multiplication des mégaprojets, tels que la nouvelle capitale administrative ou le doublement du canal de Suez, suscitent aussi beaucoup de critiques, contrastant avec le niveau de vie économique de la population. Un tiers des Égyptiens vit en effet sous le seuil de pauvreté.
Clément Steuer est chercheur au CNRS au sein du programme TARICA, politologue spécialiste de l¡¯Égypte. Il décrypte les ressorts de cette contestation naissante.
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