Les ¨¦v¨ºques du Mozambique d¨¦noncent les irr¨¦gularit¨¦s des ¨¦lections g¨¦n¨¦rales
Fabrice Bagendekere, SJ - Cité du Vatican
Au lendemain des élections générales qui ont eu lieu mercredi 9 octobre dernier au Mozambique, des mouvements de contestation ont éclaté, dénonçant des irrégularités et l'injustice dans le déroulement du processus électoral. Face au climat grandissant des violences, la Conférence épiscopale nationale a lancé un vibrant appel à mettre fin l¡¯agressivité, dénonçant entre-temps ce qu¡¯ils considèrent comme «crimes politiques et irrespect de la démocratie». Il s¡¯agit notamment de l¡¯embuscade ayant conduit à l'assassinat de Paulo Guambe, un des favoris présidents des élections qui venaient d¡¯avoir lieu, et Elvino son avocat.
Selon les évêques, cet acte barbare rappelle, avec des similitudes de méthode, d'autres assassinats de personnalités politiques ou de la société civile qui ont eu lieu à la suite d'élections antérieures. Cet usage n¡¯a d¡¯autre objectif, «sinon de faire taire, si la vérité, et plus encore la démocratie», ont-ils déclaré.
L¡¯engagement politique et social de l¡¯Eglise
L'Eglise catholique, en tant qu'institution, est apolitique et non partisane. Néanmoins, elle ne renonce pas à l¡¯engagement politique et social, tel que voulu par son magistère social. Partout où elle se trouve, elle a toujours proposé un chemin concret vers la construction d'une société plus inclusive, juste et fraternelle, une société dans laquelle la paix, la dignité et l¡¯avenir sont garantis à tout le monde. C¡¯est en tant que tel que les pères évêques du Mozambique se sont sentis chargés du devoir d¡¯agir face à la tournure que prenaient les événements dans leur pays. «Nous ne pouvons pas ne pas dénoncer la situation grave que traverse le pays et la violence qu'elle engendre, plongeant tout le monde dans le chaos», ont-ils écrit.
Les irrégularités renforcent le manque de confiance dans les organes électoraux
Les élections du 9 dernier ont connu l¡¯abstention la plus élevée de l¡¯histoire d'élections multipartites du Mozambique. Plus de la moitié des citoyens inscrits sur les listes électorales ne se sont pas présentés aux urnes. Réfléchissant sur ce phénomène, les évêques ont affirmé que cela proviendrait de la déception connue par la population lors des cycles électorales précédents. «Les irrégularités et les fraudes enregistrées lors des élections précédentes ont montré à une grande partie de la population que sa volonté, exprimée dans les urnes, n'est pas respectée, rendant inutile l'exercice de cet important droit civique», ont-ils fustigé les prélats.
Les successeurs des apôtres regrettent que le même théâtre se soit répété. Selon eux, «les irrégularités et les fraudes commises en toute impunité ont renforcé le manque de confiance dans les organes électoraux, dans les dirigeants qui abdiquent leur dignité et méprisent la vérité et le sens du service qui devrait guider ceux à qui le peuple confie son vote». A cet effet, ils ont encouragé le peuple à manifester sa méfiance et remettre en cause la légitimité des élus.
Certifier le mensonge est une fraude
L'application de la loi électorale au stade de la totalisation nationale des votes par les seules autorités compétentes ne peut garantir des résultats fiables si les données ne le sont pas. «Cela ne serait qu¡¯une certification d¡¯un mensonge, qui est une fraude», ont expliqué les évêques. Ainsi, en appellent-ils au respect du droit de manifestation, tout en mettant en garde la jeunesse contre toute forme de manipulation pouvant les entraîner à des actions de vandalisme et de déstabilisation de l¡¯ordre public. Déjà dans la note pastorale du 16 avril 2021, les pères évêques avaient attiré l'attention sur la facilité avec laquelle les jeunes de leur pays se laissent entraîner à la violence et aux comportements illégaux. Selon eux, cela est dû à «l'expérience d'un manque d'espérance en un avenir favorable... le manque d'opportunités pour construire une vie digne». Ceci, ont-ils souligné, vient du «manque de confiance aux autorités, qui devraient être garantes de la vérité».
«Les jeunes doivent être écoutés et recevoir une réponse à leurs préoccupations», ont poursuivi les prélats, reconnaissant que la jeunesse représente un grand potentiel pour leur pays. Pour cela, ont-ils affirmé, ils ne permettront pas aux partis politiques et aux groupes de pouvoir de «continuer à promouvoir leurs influences néfastes sur elle, en lui inculquant des politiques de mépris, de haine et de vengeance ou en démontrant un manque de valeurs de respect de la vérité et de l'honneur».
Trouver un chemin de retour à la normale
Les évêques mozambicains ont terminé leur adresse par une invitation à toutes les parties impliquées directement dans le processus électoral, à trouver un chemin du retour à la situation normale. Ceci implique «la nécessité de rétablir la vérité des faits», ont-ils indiqué. Pour cela, les prélats de l¡¯Eglise mozambicaine ont formulé des points de recommandations. «La toute première est de déterminer de manière transparente les résultats des élections, en publiant et en comparant les avis originaux en possession des différentes parties impliquées. La deuxième, créer des espaces de collaboration dans la gouvernance et envisager un éventuel gouvernement d'union nationale. La troisièmement, impliquer les institutions compétentes et sérieuses du pays dans la gestion des processus électoraux actuels et futurs. Enfin, chercher à donner au Mozambique un avenir plein d'espoir», tel qu¡¯on peut le lire dans le document. Il convient de souligner, en outre, que l¡¯appel de la Conférence épiscopale du Mozambique rejoint la position de plusieurs organisations de la société civile nationales et étrangères.
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