?quateur: les habitants d'Alaus¨ª re?oivent l'aide des Oblates de St Fran?ois de Sales
Franziska Gömmel ¨C Cité du Vatican
Le matin, à 4h30, s?ur Klara-Maria Falz-berger part de Quito, où elle vit depuis 1997: son pick-up est chargé de nourriture, de couvertures et de bien d¡¯autres choses dont les personnes affectées par l¡¯éboulement ont besoin. Alausí est à 400 km de la capitale, et il faut huit heures à s?ur Klara-Maria pour y arriver. Il y a quelques semaines encore, ce trajet n¡¯aurait pris que cinq heures, mais fin mars 2023, il y a eu un fort glissement de terrain dans cette ville où les S?urs Oblates de Saint-François de Sales (l¡¯ordre auquel appartient s?ur Klara-Maria) dirigent une école.
«Il était environ 21h10, dimanche soir, lorsqu¡¯un de nos professeurs de l¡¯école de Quito, dont les parents vivent à Alausí, m¡¯a appelé en désespoir: "La montagne s¡¯est effondrée et je ne sais pas ce qui est arrivé à ma famille". J¡¯ai immédiatement essayé de contacter mes s?urs, qui m¡¯ont dit: "Nous ne savons pas ce qui s¡¯est passé: il y a eu un tremblement de terre, une coupure de l¡¯électricité et maintenant les gens sont sortis dans la rue et crient. Tout le monde pleure et crie. On ne voit rien, il y a un nuage de poussière ¡ª espérons que rien n¡¯est arrivé aux autres! Nous, nous allons bien¡"».
Partir n'a jamais été une option
Lors de ses visites, s?ur Klara-Maria essaie de distribuer les biens qu¡¯elle apporte directement aux personnes restées à Alausí. Le surplus est conservé à l¡¯école. Actuellement, s?ur Klara-Maria et ses cons?urs ne viennent plus chaque semaine au village de montagne, mais maintiennent une certaine régularité dans leurs visites.
Immédiatement après l¡¯éboulement, cinq religieuses sont restées à Alausí pour prendre soin des gens. Au début, il n¡¯était pas possible de vivre à l¡¯école et elles ont donc déménagé dans la ville de Sibambe, à environ 30 kilomètres de là. Cependant, la fermeture définitive de l¡¯école n¡¯a jamais été une option, comme le souligne s?ur Klara-Maria: «Ce dont les gens ont besoin, c¡¯est que nos religieuses restent avec eux. Nous pourrions dire que la situation est vraiment dangereuse et décider de nous retirer, mais cela n¡¯est pas possible. Les gens nous demandent de ne pas fermer l¡¯école: ¡°Nous ne pouvons même pas imaginer que l¡¯école ne soit plus là! Nous avons besoin de vous!¡±. Partir, ce serait comme trahir tous ces gens¡».
Le déséspoir et les larmes ont laissé la place à l'indifférence
Entre-temps, la vie quotidienne a plus ou moins repris à Alausí. De nombreuses familles n¡¯ont toujours pas de maison, car la leur est ensevelie sous l¡¯éboulement, explique s?ur Klara-Maria: «Malheureusement, elles attendent encore que l¡¯Etat, tôt ou tard, leur assigne un nouveau terrain». Fin juin, le gouvernement équatorien a également suspendu l¡¯acheminement de l¡¯aide d¡¯urgence aux victimes de la catastrophe naturelle. C¡¯est pour cette raison que la population locale commence à reconstruire le village par elle-même, autant que possible, en attendant l¡¯aide du gouvernement: pour relier Alausí aux villages de montagne environnants, par exemple, elle a stabilisé le glissement de terrain pour créer de nouvelles liaisons routières.
Après l¡¯éboulement, les religieuses sont restées à Alausí pour que les gens aient quelqu¡¯un à qui parler ou quelqu¡¯un qui les écoute. S?ur Klara-Maria constate que les familles ne parlent pas de ce qui s¡¯est passé: le désespoir et les larmes du premier instant ont été remplacées par «une indifférence presque inhumaine». «On a tendance à minimiser: ¡°Bon, ce n¡¯est pas grave, ça aurait pu être pire, on est encore en vie et ça va comme ça¡±. Mais si quelqu¡¯un vient ¡°d¡¯en-dehors du village¡± et pose des questions, eh bien, avec cette personne, tu peux ¡°te décharger¡± de tout ce que tu as gardé comprimé au fond de toi-même pour ne pas blesser les autres».
Reprendre la vie comme avant
En premier lieu, les Oblates veuillent à rétablir les rythmes de la vie quotidienne à Alausí. Au début, les cours ne pouvaient avoir lieu que virtuellement, mais les s?urs y étaient habituées depuis l¡¯époque de la pandémie. Immédiatement après la catastrophe, les religieuses ont contacté tous les élèves pour leur demander des nouvelles de leur santé, de leur maison et s¡¯ils avaient perdu l¡¯un de leurs proches.
«Et il n¡¯y a presque personne qui ne pleure pas l¡¯un de ses proches. Ce ne sont pas toujours des membres de la famille, mais peut-être des voisins, des amis, des souvenirs¡ [¡] Les enfants ont besoin de distraction, ils ont besoin de quelqu¡¯un à qui parler, ils ont besoin de sentir que ¡°la vie continue, même si dans ma famille il y a eu sept, huit morts: malgré la douleur, je dois poursuivre ma vie¡±... Ce n¡¯est pas seulement une aide intellectuelle, c¡¯est une forme de soutien totalement humaine¡».
Fin juin 2023, trois mois après le glissement de terrain, les travaux de récupération ont été arrêtés. A cette date, les sauveteurs avaient récupéré 65 morts, mais s?ur Klara-Maria sait qu¡¯il y a au moins dix autres personnes qui resteront à jamais ensevelies par l¡¯éboulement, car Nuevo-Alausí est encore recouvert par 40 mètres de terre. Il était prévisible qu¡¯un glissement de terrain se produise, ils sont fréquents dans cette zone, mais jamais ils n¡¯avaient atteint de telles proportions. Pour cette raison, beaucoup de gens étaient convaincus qu¡¯ils se seraient rendus compte que la terre commençait à s¡¯effondrer et qu¡¯ils auraient eu le temps de s¡¯échapper.
Immédiatement après l¡¯éboulement, beaucoup de gens sont partis parce que leur maison était détruite ou simplement parce qu¡¯ils craignaient que la montagne continue à s¡¯écrouler. Mais ces derniers mois et semaines, nombre d¡¯entre eux sont rentrés. À long terme, les frais de sous-location dans les villages voisins étaient trop élevés, l¡¯école ou le travail trop éloignés.
L'espérance et la solidarité
Après la grande frayeur qui a immédiatement suivi le glissement de terrain, s?ur Klara-Maria et ses cons?urs ont trouvé un nouvel espoir dans la ville. Et c¡¯est ainsi que le 26 avril, un mois après la catastrophe, le drapeau d¡¯Alausí a été hissé à nouveau sur le «Puente Negro».
«Par exemple, depuis Quito, les élèves de nombreuses écoles, qui ne connaissent ni les enfants d¡¯Alausí, ni notre Institut, nous ont envoyé des aides, et pas seulement des produits de première nécessité. L¡¯initiative d¡¯une école qui a demandé à ses élèves du primaire d¡¯écrire des lettres à apporter aux enfants d¡¯Alausí a été particulièrement affectueuse. La première fois, j¡¯ai moi-même apporté un sac rempli de lettres pour que nos religieuses puissent transmettre aux enfants, aux professeurs et aux gens les messages qu¡¯elles contenaient: ¡°Je suis avec toi. Ne te décourage pas. Le Seigneur te protège¡±. Ce sont de toutes petites pensées qui redonnent de l¡¯espoir...».
Des messages semblables ont également été écrits sur les canettes que les S?urs Oblates de Quito ont apportées à Alausí. Immédiatement après l¡¯éboulement, les S?urs Oblates de Saint-François de Sales en Autriche ont lancé une campagne de collecte de fonds qui s¡¯est terminée depuis. Mais s?ur Klara-Maria sait qu¡¯elle peut toujours compter sur ses cons?urs, même hors de l¡¯Équateur, et sur leur soutien en cas de besoin. «Je crois que l¡¯entraide est une lumière pour ceux qui croient avoir tout perdu. Il y a une immense solidarité dans la population: c¡¯est dans ces circonstances qu¡¯on se rend compte que les gens s¡¯entraident».
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