Mgr Aziagbia : les dispositions ¨¤ prendre doivent tenir compte des valeurs et pratiques culturelles
Entretien réalisé par Jean Pierre Bodjoko, SJ ¨C Cité du Vatican
L¡¯appréhension du Phénomène des abus sexuels sur les mineurs varie d¡¯une région à une autre en raison des valeurs et pratiques culturelles. C¡¯est ce que nous explique Mgr Nestor Désiré Nongo Aziagbia, évêque de Bossangoa et président de la Conférence Episcopale de la République centrafricaine.
Vous êtes à Rome pour participer à ce sommet consacré à la protection des mineurs. D'abord votre point de vue sur l'importance de cette rencontre.
La situation des violences contre les mineurs dans la société de manière générale est une grande préoccupation. Et l¡¯Eglise par cette conférence veut contribuer à l'éradication de ce fléau qui affecte notre société et créer un environnement sain pour la jeunesse et les enfants. Je pense que c'est une initiative qui vaut la peine d'être encouragée.
Quand on réunit les présidents de toutes les conférences épiscopales du monde pour évoquer les problèmes qui se posent principalement en Amérique et en Europe cela veut dire que c¡¯est une affaire de l¡¯Eglise en général. Est-ce qu¡¯il y a des cas particuliers par exemple dans votre pays ?
Les cas d'abus de mineurs ne manquent pas. Le contexte socioculturel est un peu différent au point que peut-être il n' y a pas de publicité qui est faite à ce sujet comme on en entend parler en Europe et en Amérique. Nous sommes dans une société où il y a un certain sentiment de pudeur qui fait que tout ce qui est lié au sexe n'est pas discuté publiquement. Mais en dépit je dirais des dispositions légales, les parents continuent encore à faire marier leurs enfants à un âge très mineur donc entre la pratique culturelle et les dispositions légales, c¡¯est vraiment difficile d'appréhender la question des abus sexuels à la manière européenne.
Malgré ce contexte culturel il y a quand même une certaine disposition ou des pratiques pour protéger les mineurs ?
Dans notre pays la législation, la constitution reconnaît des dispositions pour la protection des mineurs. Mais la mise en place ou bien l'application de ces dispositions légales n'est pas toujours suivie. Bien souvent les parents eux-mêmes ne portent pas la question en justice. Ils ne veulent pas se déshonorer, ils ne veulent pas déshonorer leurs enfants. Ils préfèrent un traitement à l'amiable au niveau familial, au niveau communautaire. Certaines dispositions existent mais ces dispositions ne sont pas toujours suivies.
Il n'y a pas beaucoup de cas par exemple de scandales publics ?
Au niveau de l'Eglise¡ A ma connaissance pas beaucoup. Il y a eu l'un ou l'autre cas qui ont été évoqués et ces cas ont été traités avec toute l'attention qu'ils méritent.
Et de toute façon les familles et les parents continuent encore à faire confiance¡ en confiant à l¡¯Eglise leurs enfants ?
Tout à fait¡Et c'est là où nous devons à notre niveau mettre en place les dispositions nécessaires pour ne pas décevoir cette confiance que les familles placent en l'église.
Qu'est-ce que cette rencontre pour la protection des mineurs a porté à votre connaissance pour aborder par exemple ¡d'une certaine manière ces problèmes dans votre pays ou pour les prévenir.
Nous sommes une société ouverte au monde et je sais que de plus en plus les partenariats que l'Eglise établit avec certains organismes¡ Ils exigent des mécanismes de protection des mineurs. Nous sommes interpellés à ce niveau-là à prendre conscience de ce fait, de ce fléau qui est réel, à travailler à élaborer des mécanismes de protection. La Conférence épiscopale est en train de travailler à cela et nous espérons que d'ici notre prochaine assemblée du mois de juin, nous sortirons un document relatif à la protection des enfants.
L'Eglise qui est en Centrafrique peut aussi apporter sa contribution. Vous avez parlé par exemple de l'importance des valeurs culturelles pour traiter certains cas quand il y a des abus sexuels. Est-ce que cela pourrait être un apport positif pour ce sommet ?
C'est un aspect qui est ressorti dans les échanges que nous avons eus entre nous des confrères qui viennent de nos sociétés à majorité musulmane mettent en avant cet aspect-là. Donc je pense qu'il faudra prendre en compte dans les discussions, les résolutions¡A prendre toutes les dispositions nécessaires en tenant compte des valeurs culturelles, des pratiques culturelles.
Un mot de la fin¡..
L'Eglise est interpellée aujourd'hui. Les critiques vis à vis de l'église peuvent être considérées comme des aspects positifs parce que la population regarde avec confiance vers l'église. Et à ce niveau-là, nous devons prendre notre responsabilité, être au niveau de la confiance que la société de manière générale place en nous.
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